L’école primaire pour tous, mais pas pour tout de suite

Même si les États africains ont fait de l’enseignement une priorité, les investissements sont à la traîne. Au point qu’aujourd’hui encore, sur le continent, un jeune sur trois n’achève pas le primaire.

École Jean Delafosse des 220 logements, à Abidjan, en Cote d’Ivoire. © Guillaume Binet /MYOP/pour J.A.

École Jean Delafosse des 220 logements, à Abidjan, en Cote d’Ivoire. © Guillaume Binet /MYOP/pour J.A.

Publié le 19 novembre 2015 Lecture : 3 minutes.

L’accès à l’éducation reste un défi majeur pour l’Afrique subsaharienne et sa population, dont les deux tiers ont de moins de 25 ans. La région compte près de 30 millions d’enfants non scolarisés, soit un peu plus de la moitié des effectifs mondiaux.  « Il faut relativiser ce chiffre, prévient Rohen d’Aiglepierre, économiste à l’Agence française de développement. Depuis 2000, la croissance annuelle des taux de scolarisation est impressionnante, mais la région est en pleine croissance démographique, et les pays ne peuvent pas faire beaucoup mieux. »

Taux

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Depuis quinze ans, le taux de scolarisation a, de fait, largement progressé. La fréquentation scolaire dans le primaire est passée de 58 % en 1999 à 79 % en 2012. Au Niger, en particulier, le taux net d’accès au primaire a plus que doublé (63,7 % en 2011 contre 27,5 % en 1999).

Globalement, les États ont beaucoup investi pour atteindre les objectifs fixés par l’Unesco (enseignement primaire universel, égalité des sexes…) lors du Forum mondial sur l’éducation de Dakar, en 2000.

« En 2012, les gouvernements d’Afrique subsaharienne francophone ont dépensé en moyenne 17,7 % de leur budget total pour l’éducation [contre 15 % dans le reste du monde] », précise Jean-Marc Bernard, directeur technique adjoint au secrétariat du Partenariat mondial pour l’éducation.

Plus de la moitié des enfants non scolarisés dans le monde vivent en Afrique subsaharienne.

Impact limité

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Reste que l’investissement varie selon les pays. Le Bénin, le Niger et le Sénégal consacrent plus de 20 % de leurs dépenses publiques à l’éducation ; la Centrafrique, moins de 10 %. Le Burkina Faso, le Cameroun et la Guinée réduisent même leurs dépenses. Par ailleurs, le faible poids du secteur public dans l’économie de ces pays limite l’impact des politiques volontaristes.

Finalement, la région ne consacrait en 2012 que 4 % de son PIB à l’éducation, contre 5,7 % en moyenne pour les pays de l’OCDE. Avec, là aussi, des différences : le Burundi y investissait 6 % de son PIB, mais la Centrafrique, 1,2 % seulement. « Au Niger, par exemple, malgré un effort considérable en faveur de l’éducation, la capacité fiscale étant limitée, l’argent investi reste très faible », précise Jean-Marc Bernard.

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Aide

Pour pallier ce déficit, les gouvernements peuvent aussi compter sur les familles, principale source privée de financement pour l’éducation et qui assurent 30 % des ressources du primaire, et sur la communauté internationale. « L’aide de cette dernière est insuffisante », estime cependant Jean-Marc Bernard.

Entre 2008 et 2012, tandis que l’aide à la santé augmentait de 28 % dans le monde (passant de 15,6 milliards à 20 milliards de dollars, soit de 11 milliards à 15,1 milliards d’euros environ), celle apportée à l’éducation diminuait de 3,3 %. L’aide à l’éducation de base en Afrique subsaharienne est passée de 1,8 milliard de dollars en 2010 à 1,6 milliard de dollars en 2012, selon l’Unesco.

Bourse

L’argent n’est pas forcément bien réparti. « L’enseignement primaire n’en profite pas assez, estime Elise Legault, spécialiste du financement de l’éducation à l’Institut de statistique de l’Unesco. Une majorité de l’aide des partenaires bilatéraux, les états, est destinée à l’enseignement post-secondaire. Elle finance les bourses des jeunes qui viennent étudier en Allemagne ou en France. »

Enfin, un autre défi majeur se pose encore : celui de dispenser une éducation de qualité. « Les objectifs pour le développement durable sont encore plus ambitieux que les Objectifs du millénaire pour le développement, insiste Elise Legault. L’accent est mis aujourd’hui sur la qualité de l’éducation, et non plus simplement sur le fait d’y avoir accès. Cela passe par une meilleure formation des professeurs, par l’achat de manuels scolaires… Il faut que les enfants sortent de l’école en ayant effectivement appris quelque chose. »

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