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Pourquoi l’ Afrique grossit

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Dr Steve Léonce Zougrana : « L’OMS parle d’une épidémie d’obésité »

Gastroentérologue, nutritionniste, directeur de la clinique de l’Amitié à Ouagadougou (Burkina Faso) et président de l’ONG Promouvoir la nutrition et l’hygiène en Afrique (PNHA), le Dr Steve Léonce Zougrana donne son éclairage.

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Mis à jour le 3 août 2010 à 10:50

Dr Steve Léonce Zougrana. © Hippolyte Sama pour J.A.

Jeune Afrique : Selon une étude de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) à laquelle vous avez participé, 36 % des femmes et 14,5 % des hommes de Ouagadougou sont en surpoids. Ces chiffres sont-ils en forte progression ?

Dr Steve Léonce Zoungrana : Oui, et en progression rapide. D’ailleurs, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) parle d’une épidémie de l’obésité. Avec l’urbanisation, nous assistons à une profonde modification des comportements. En ville, les aliments sont en abondance et finalement accessibles pour le plus grand nombre. Parallèlement, avec la voiture ou les deux-roues, la population est de plus en plus sédentaire. En fait, le comportement traditionnel africain, basé sur une alimentation à base de légumineuses et d’animaux sauvages peu gras – contrairement aux productions d’élevage – et une activité physique régulière avec les travaux des champs, est relégué au second plan.

Des exemples ?

En ville, les habitants ont pris l’habitude de consommer beaucoup de viande dans les maquis en fin de journée. Ce sont des viandes grasses, notamment des grillades. Le tout est accompagné de boissons, notamment d’alcool : un sucre rapide qui passe directement dans le sang. Cette combinaison hautement énergé­tique favorise la prise de poids. Et lorsqu’il s’agit de viandes blanches, elles sont cuisinées avec beaucoup d’huile.

La malbouffe à l’occidentale fait-elle son apparition ?

Le phénomène est édifiant. À chaque coin de rue, vous avez un véhicule équipé qui vend des hamburgers, des chawarmas, des viennoiseries, des pâtisseries… Cette disponibilité alimentaire est permanente, y compris la nuit, or les graisses s’accumulent durant le sommeil.

Nous assistons également à des troubles du comportement alimentaire : la déstructuration du rythme des repas ; le grignotage durant la journée à base de chocolat, de chips ou d’arachide ; une consommation excessive de certains aliments ; voire des compulsions alimentaires.