Dans la moiteur érythréenne

« La Huitième vibration », de Carlo Lucarelli. © D.R.

« La Huitième vibration », de Carlo Lucarelli. © D.R.

Publié le 3 août 2010 Lecture : 2 minutes.

Dans la colonie italienne d’Érythrée, il y a des fonctionnaires véreux, des anarchistes, un idéaliste qui mourra d’avoir rêvé trop fort, un major drogué et psychotique, des dames qui s’ennuient, en rade à Massaoua, des héros qui se perdent dans les sables mouvants de l’Histoire, une prostituée à l’allure animale qui fait tomber tous les mâles, et un mystérieux tueur d’enfants.

On est en 1896 et il y a la guerre : on s’espionne, on s’épie, on piste les envoyés spéciaux du négus, de l’Éthiopie voisine, on égorge les traîtres… Il y a « cette armée de recrues ramassées au hasard dans tous les bataillons du royaume » qui parlent tous les dialectes de l’Italie et recréent leur Botte natale en miniature. Et il y a Massaoua, le port étouffant où se trament toutes les intrigues. La nuit, dans ses ruelles, « on entend parler, doucement, on entend murmurer, dans un arabe aspiré et rauque, dans un tigré large, aux voyelles ouvertes, on entend chuchoter, dans la langue des Baria et des Kounama, dans les dialectes de Bombay et de Sumatra des commerçants banians, en grec et aussi en amharique, mais là doucement, très doucement, parce que c’est la langue du négus et des espions ».

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La Huitième Vibration (à paraître le 19 août) est un roman d’aventures, pimenté d’histoires d’amour et de sexe (où l’on parle même d’homosexualité), mais on peut aussi le lire comme un polar ou un thriller historique. Carlo Lucarelli, scénariste et dramaturge italien, anime une émission de télévision sur des affaires non résolues et a publié plusieurs romans policiers dans son pays, dont certains sont des best-sellers. Voilà sans doute pourquoi il a réussi à ficeler parfaitement cette intrigue haletante. Son deuxième fait de plume consiste à immerger totalement le lecteur dans la moiteur érythréenne. Sur cette terre brûlante de la Corne de l’Afrique, on se prend à suffoquer à cause de la chaleur. Mais pas seulement : l’auteur instille le malaise dans des situations a priori anodines, et fait planer l’ombre du Sheitan (« Satan ») sur ce microcosme colonial étouffé par sa vanité et déjà en déliquescence.

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