Dans ce dossier
50 ans, 50 lecteurs, 50 regards sur J.A.
Depuis quand je lis Jeune Afrique ? Depuis le début, voyons ! Cette histoire d’amour remonte à une époque où, si vous ne vouliez pas faire tapisserie en société, vous aviez intérêt d’avoir lu le dernier journal, car beaucoup de conversations commençaient ainsi : « Dis, tu as lu le dernier article de Jeune Afrique sur… »
Le magazine avait un nom qui lui allait bien. Jeune, comme nos pays. Chaque semaine, j’attendais avec impatience de le lire, je frémissais d’impatience de savoir ce qui se passait dans tous ces nouveaux États : Cameroun, Côte d’Ivoire, Sénégal, Congo… J’étais si fière de savoir que nous étions indépendants, libres de prendre nos destins en main. Cinquante ans après, je suis mortifiée. Que laissons-nous aux jeunes générations ? Qu’avons-nous fait de notre liberté ? Fini la méritocratie, le travail n’a plus de valeur. Il faut faire partie d’une riche famille pour avoir droit aux études et au travail. Rien à voir avec ma jeunesse, où tous ceux qui avaient de bons résultats scolaires pouvaient poursuivre leurs études en France grâce à une bourse d’État.
Aujourd’hui, chômage, délestages, justice arbitraire, intolérance… Voici le quotidien des nouvelles générations. Et je me désole de constater que les pères de nos indépendances ou leurs successeurs, qui ont été soutenus par J.A., sont prêts à l’interdire quand il ose dénoncer leurs abus. Heureusement que, avec subtilité, il arrive malgré tout à dire les choses.