« Si des négociations sont menées entre le gouvernement et le CNT [Conseil national de transition, organe de la rébellion libyenne], la Tunisie est prédisposée à reconnaître ce conseil », a déclaré mardi M. Taieb Baccouche, le ministre de l’Éducation et porte-parole du Conseil des ministres tunisien.
En donnant son accord à une éventuelle demande de reconnaissance du CNT, le gouvernement tunisien serait donc enclin à être moins neutre dans cette crise. « Au début la Tunisie avait observé une neutralité absolue en raison des liens de voisinage et du nombre croissant de réfugiés arrivant en Tunisie », se justifie M. Baccouche.
Ingérence inacceptable de Kadhafi…
La nouvelle ligne du gouvernement tunisien avait été exprimée dès lundi par le Premier ministre de transition Béji Caïd Essebsi sur Al-Jazira : « Nous reconnaîtrons [le CNT] lorsqu’il nous le demandera. » Les raisons invoquées d’un tel revirement ? Les propos accusateurs du colonel Kadhafi au sujet de la révolution tunisienne. « Il s’est permis de s’immiscer dans les affaires tunisiennes en appelant les Tunisiens à garder [le président déchu] Ben Ali […] Cela a été très mal perçu par le peuple et le gouvernement tunisiens », a rappelé M. Baccouche.
Une attitude « inacceptable » selon le gouvernement tunisien, qui n’hésite plus à fustiger le régime Kadhafi, non sans raison. Le territoire tunisien aurait été bombardé, aux alentours de la frontière libyenne, a indiqué le ministre. L’information provient de témoins, qui auraient été la cible de tirs d’obus ou de roquettes mardi. « J’ai compté dix obus tombés mardi […] dont certains au nord de la cité Oued Erouth, un quartier à l’ouest de Dehiba », à 1,5 km de la frontière, affirme Mourad, un résident.
Les obus, tombant sur le territoire dès 7h30 (heure locale), n’auraient pas fait de victimes du côté tunisien, d’après les propos des témoins et d’un responsable du Croissant-Rouge. Toutefois, la présence de l’armée tunisienne serait renforcée dans le secteur et des hélicoptères survoleraient la frontière, ont déclaré les habitants.
… ou chute répétée d’obus libyens
Ces tirs ne sont pas les premiers en terre tunisienne. Le 17 mai, le gouvernement de Béji Caïd Essebsi avait menacé de saisir l’ONU, suite à la chute de six obus libyens sans conséquence meurtrière le 7 mai près de Dehiba.
Les bombardements de ces dernières vingt-quatre heures, eux, n’ont pas été confirmés par le colonel Mokhtar Ben Nasr, l’un des responsables du ministère de la Défense à Tunis. Les postes de police et de la Garde nationale tunisienne à Dehiba ont eux aussi démenti, assurant qu’aucun tir d’obus n’avait franchi la frontière mardi.
Par contre, un groupe de militaires pro-Kadhafi aurait fait défection avant de se réfugier en Tunisie, avec, parmi eux, un haut gradé, admet Mokhtar Ben Nasr. Une trentaine de blessés libyens auraient, eux aussi, passé la frontière, transférés suite aux combats entre rebelles et partisans de Kadhafi. Ils viennent s’ajouter aux 6 330 réfugiés en provenance de la Libye entrés en Tunisie au cours des dernières vingt-quatre heures, d’après le colonel. (Avec AFP)