Présidentielle camerounaise : le fossé se creuse entre les jeunes et les élites

La participation des jeunes est l’un des enjeux de l’élection présidentielle camerounaise. Pourtant, sur le terrain, ils ne sont pas nombreux à se sentir concernés par un scrutin qu’ils jugent fréquemment sans intérêt.

Capture d’écran YouTube du clip de Valsero, « Lettre au président ». © Jeuneafrique.com

Capture d’écran YouTube du clip de Valsero, « Lettre au président ». © Jeuneafrique.com

Publié le 7 octobre 2011 Lecture : 2 minutes.

Présidentielle camerounaise : Paul Biya, jusqu’à quand ?
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Présidentielle camerounaise : Paul Biya, jusqu’à quand ?

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À part ceux du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, parti de Paul Biya), les jeunes semblent se désintéresser totalement de la politique. Leurs témoignages se ressemblent. La plupart de ceux qu’on croise dans les rues de Yaoundé l’affirment : « On n’ira pas voter puisque les jeux sont déjà faits ! Ce serait comme d’aller voir un match Barça-Real en connaissant déjà le résultat ! »

Vendredi, Elections Cameroon (Elecam) ne disposait toujours pas du pourcentage de jeunes inscrits sur les listes électorales. « Elecam se concentre sur la distribution des cartes d’électeurs » se justifiait-on au siège de cet organisme chargé d’organiser l’élection présidentielle. La participation des jeunes est pourtant l’un des enjeux du scrutin. À eux seuls, ils représentent plus de la moitié de la population camerounaise.

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Frustration

La campagne électorale ne tend pas à rapprocher la jeunesse des élites au pouvoir au Cameroun. Ce serait même plutôt l’inverse, selon le politologue Eric Martial Owana Nguini. « Le fossé s’agrandit car toute la machinerie sociale et le circuit étatique en particulier ne parviennent pas à insérer une bonne partie des jeunes, surtout ceux qui sont formés. Cette jeunesse ressent donc une certaine frustration car elle a été préparée à accéder à des positions sociales attrayantes ».

D’après l’ONG International Crisis Group, les postes à responsabilité économique et politique sont, la plupart du temps, occupés par des dirigeants de 60 voire 70 ans. Dans le même temps, le taux de chômage des jeunes atteint 22 % officiellement mais sans doute beaucoup plus dans la réalité. Certains arrivent à s’en sortir mais la majorité vit du système D en devenant « call boxer » (vendeur de crédit téléphonique) ou « benskinner » (conducteur de moto taxi à Douala).

"Bétail électoral"

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À 34 ans, le rappeur Valsero est devenu le porte-parole de cette jeunesse désabusée. Dans son petit studio taggué de Yaoundé, au quartier Melen, le « Général » comme on l’appelle au Cameroun, ne mâche pas ses mots : « Ici, les jeunes, c’est du bétail électoral, du bétail pour applaudir dans les meetings. C’est ridicule car on parle des jeunes dans chaque discours politique mais en fait, les jeunes ne pensent pas ici, ils sont dirigés par la peur »

Au début de l’année, Paul Biya a annoncé la création de 25000 emplois réservés aux jeunes dans la fonction publique. L’État a reçu 300 000 dossiers. Dans son dernier titre, « 3e lettre au président », le « Général » y fait référence : « T’as promis 25 000 emplois, 9 millions de chômeurs, excuse-moi, c’est comme donner un os à une centaine de lions ».

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Éric Martial Owana Nguini estime quant à lui que la mesure relève de « l’électoralisme ». Pour le politologue, « cette solution là montre les tensions auxquelles les autorités vont faire face dans les mois et les années à venir », dit-il avant d’affirmer que Paul Biya ne quittera pas le pouvoir de sitôt. « Il n’y aura pas d’alternance pacifique au Cameroun ».

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