Culture

Exposition : horreurs ghanéennes

Des muscles à faire pâlir de jalousie Sylvester Stallone au temps de sa splendeur, des mines patibulaires, des litres d’hémoglobine, des armes en tout genre, des démons d’outre-tombe, de la sorcellerie, des divinités sorties d’un fleuve… Bienvenue dans l’univers fabuleux des séries Z ghanéennes. Jusqu’au 19 mai, le musée du quai Branly, à Paris, présente une dizaine d’affiches réalisées pour les vidéoclubs d’Accra.

Mis à jour le 1 mars 2013 à 17:05

Affiches de l’exposition au Quai Branly. © DR

Peintes sur des toiles de sac de riz par des artistes autodidactes entre les années 1980 et la fin des années 1990, elles vantent d’abord des long-métrages américains puis des productions locales réalisées en réaction à un cinéma d’auteur longtemps soutenu par les Britanniques et des films nigérians. « Suite à la crise économique des années 1980 et à la fermeture des salles de projection, un cinéma populaire s’est développé en renouant avec la tradition des contes et du théâtre et diffusé en cassette vidéo », explique Germain Viatte commissaire de l’exposition Le Rire, l’horreur et la mort. C’est la grande époque des « Juju films », mêlant magie et sorcellerie et contant des histoires africaines effrayantes (sacrifices d’enfant, pouvoirs maléfiques, zombies…).

 

 

« Derrière l’imagerie de ces affiches et de ces films, c’est tout un monde traditionnel transformé par l’urbanisation qui est décelable », suggère Germain Viatte. Fabriquées en une semaine avec des moyens limités, ces vidéos sont souvent très moralisatrices, glorifient le triomphe du bien sur le mal et dénoncent les maux associés aux sociétés urbaines contemporaines (prostitution, corruption, pouvoir de l’argent…). Les églises chrétiennes et musulmanes en ont fait un outil privilégié de propagande. On y trouve également un goût prononcé pour le rire et le morbide très visible sur les affiches. Démoniaque !

* Le Rire, l’horreur et la mort. Affiches peintes des vidéoclubs et images des morts au Ghana, jusqu’au 19 avril au musée du Quai Branly, à Paris.

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Séverine Kodjo-Grandvaux