Beaucoup de mines sont renfrognées, à l’occasion du 30e anniversaire de la Journée mondiale de la liberté de la presse, ce 3 mai. Certes, António Guterres, le secrétaire général des Nations unies (ONU), reconnaît, qu’au cours des trois décennies passées, des progrès ont été enregistrés en matière de lois garantissant l’accès à l’information.
Mais, se désolent de nombreux observateurs, des maux nouveaux ou anciens minent encore et toujours les métiers du secteur : assassinats – 55 journalistes et 4 collaborateurs des médias tués en 2022, selon Reporters sans frontières (RSF) –, harcèlement, arrestations, enlèvements, modèle économique ébranlé par la technologie, et – c’est le fait marquant de l’ère contemporaine –, une avalanche de contenus racoleurs, de désinformation, de conspirationnisme, de propagande, de diatribes haineuses et de commentaires contre-productifs qui ont tendance à noyer les contenus de qualité.
Et l’Afrique n’est pas en reste, puisque António Guterres dénonce une liberté de la presse attaquée « aux quatre coins du monde », alors même que « la liberté d’expression comme moteur de tous les autres droits de l’homme » a été choisi comme le thème de l’édition 2023 de cette journée mondiale.
RSF note même des dégradations des conditions de travail dans des pays qui n’ont ni l’excuse ni le prétexte de l’agression terroriste. Ainsi, le Sénégal, exemple traditionnel de pluralisme, a-t-il dégringolé, en un an, de la 73e à la 104e place, sur 180, dans la 21e édition du Classement mondial de la liberté de la presse. Une recrudescence des menaces verbales, physiques et judiciaires envers les journalistes sénégalais fait craindre un recul du droit à l’information.
L’appel des 30
Ailleurs, le continent – notamment sa partie subsaharienne – est décrit par Reporters sans frontières comme « le nouveau laboratoire de la désinformation et de la propagande « , en particulier dans les zones en proie à des conflits et à des menaces sécuritaires.
Conscients de ces menaces devenues réalités, trente organisations et médias africains et internationaux viennent de lancer un appel en direction des autorités du Burkina Faso et du Mali.
Un attelage somme toute hétéroclite, qui comporte des associations, centres de presse, fédérations et autres fondations, des médias internationaux localement censurés (France 24, RFI), d’autres qui ont vu leurs correspondants expulsés (Libération, Le Monde, mais aussi Jeune Afrique, dont l’envoyé spécial a été renvoyé du Mali) et des organes de presse locaux comme le malien Joliba TV News ou le burkinabè Courrier confidentiel. Un texte collectif dénonce des mesures « de nature à remettre en cause le droit fondamental des citoyens à être informés », avec la complicité d’« influenceurs qui jouent aux justiciers et n’hésitent pas à menacer de mort les journalistes et leaders d’opinion ».