À l’heure où partout ailleurs sur le continent les bases militaires étrangères – françaises en particulier – sont de plus en plus considérées comme indésirables au point de devenir les abcès de cristallisation du néo-souverainisme africain, la République de Djibouti vit dans la sérénité sa cohabitation avec la présence permanente sur son sol de plusieurs milliers de soldats venus de trois continents. Une singularité due à trois facteurs. Géopolitique, tout d’abord : pour ce petit pays tardivement indépendant, confronté aux convoitises de ses voisins, les bases constituent une sorte d’assurance-vie dont le million de Djiboutiens a intégré la nécessité. Financier, ensuite : le loyer de ces implantations contribue de façon significative au budget national. Mémoriel, enfin : contrairement à d’autres, Djibouti n’a pas vécu la période coloniale comme un traumatisme sur lequel prendre une quelconque revanche, tant elle fut pelliculaire, mais comme une étape de la construction nationale.

Ismaïl Omar Guelleh, président de Djibouti, le 13 mars 2023. © Vincent Fournier pour JA.