Niger : des échanges à forte teneur en uranium

Encore largement tributaire de ses gisements uranifères, le Niger développe les autres filières extractives. Les investisseurs étrangers sont à l’affût.

Près d’Arlit, l’un des sites exploités par Areva NC Niger, via La Somaïr. © Djibo Tagaza pour J.A.

Près d’Arlit, l’un des sites exploités par Areva NC Niger, via La Somaïr. © Djibo Tagaza pour J.A.

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Publié le 4 mai 2012 Lecture : 4 minutes.

Niger : l’effet Issoufou
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Niger : l’effet Issoufou

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À ceux qui en doutaient et malgré les rumeurs persistantes, Areva le confirme : le développement d’Imouraren au Niger, l’un des plus grands gisements d’uranium au monde (200 000 tonnes de réserves), demeure l’un des six projets phares de l’entreprise. Malgré quelques retards dus à des problèmes d’insécurité – quatre collaborateurs du groupe français, enlevés en septembre 2010, sont toujours détenus par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) -, la phase de développement se poursuit et même s’accélère. Sur place, les engins miniers sont en cours d’assemblage, les travaux de la base de vie et de la piste d’atterrissage sont en passe de s’achever, le bassin de rétention d’eau est fini. Déjà, 1 100 statutaires et 800 sous-traitants s’activent ; ils devraient être quelque 4 000 à terme pour mener à bien la construction. « Nous souhaitons démarrer la production le plus rapidement possible, peut-être fin 2014 », indique-t-on au siège d’Areva, à Paris.

Yellow cake. De quoi apaiser le président Mahamadou Issoufou, qui souhaite que ce projet titanesque réussisse avant la fin de son quinquennat, en 2016. Avec une production attendue de 5 000 t par an, l’exploitation d’Imouraren propulsera le pays au rang de deuxième producteur mondial de combustible nucléaire – il occupe actuellement la sixième place, derrière le Canada et devant le Kazakhstan, l’Australie et la Namibie. Malgré Fukushima-Daiichi et la contraction du marché de l’uranium, les investissements n’ont pas été remis en cause et le minerais demeure la principale source de recettes du Trésor public.

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L’activité d’Areva sur les sites d’Arlit est réalisée par deux sociétés de droit nigérien, Somaïr et Cominak, dont le groupe français est l’opérateur et le principal actionnaire à travers sa filiale, Areva NC Niger. Avec 5 161 t produites en 2011, elle permet déjà au pays d’engranger 190 millions d’euros par an en taxes, dividendes et contributions diverses. De son côté, la China Nuclear International Uranium Corporation (Cniuc), filiale de la China National Nuclear Corporation (CNNC), monte en puissance. Exploitée par la Société des mines d’Azelik (Somina), coentreprise entre la CNNC, l’État du Niger (33 %, dont une minorité de blocage en cas de conflit), le fonds d’investissement chinois ZXJOY Invest et Korea Resources Corporation, la mine d’Azelik, opérationnelle depuis décembre 2010, a produit 105 t de yellow cake en 2011 et devrait en fournir 305 t cette année, selon le ministre des Mines, Omar Hamidou Tchiana.

Lendemains en or. Cependant, pour ne pas se reposer sur cette manne uranifère, le gouvernement s’active à la diversification de la production minière. En premier lieu, il s’est attaché à multiplier l’attribution de permis de recherche, d’or notamment. Les candidats ne manquent pas, les cours restant à des niveaux records (1 700 dollars l’once fin mars, soit quatre fois son prix d’il y a cinq ans). En juillet dernier, le gouvernement a accordé six permis d’exploration : deux au canadien AMI Resources, deux à son compatriote Cassidy Gold Corporation (qui doit investir plus de 2 millions de dollars d’ici à 2014, soit 1,5 million d’euros) et deux autres à Geodrill-Ghana Ltd (qui mobiliseront chacun 2 millions de dollars). Dans ces contrats, en cas de découverte, l’État s’est gardé la possibilité d’entrer jusqu’à hauteur de 40 % dans le capital d’une coentreprise sur chacun des permis (dont 10 % cédés gratuitement).

Pour l’heure, le canadien Semafo, à travers sa filiale Société des mines du Liptako, reste l’unique producteur d’or dans le pays avec sa mine de Samira Hill, située dans la ceinture aurifère d’Horizon Samira, à 90 km à l’ouest de Niamey, dont il indique avoir extrait 46 700 onces, soit 1,45 t d’or, en 2011. Galvanisé lui aussi par les cours du métal jaune, le groupe investira encore 6 millions de dollars cette année (contre 5,9 millions en 2011) dans ses activités d’exploration.

Charbon profond. L’État relance également la production de charbon, le pays disposant d’importantes réserves, bien que très profondes, et a signé mi-2011 une convention de recherche avec la Société nigérienne de charbon (Sonichar, publique à 70 %). « Certes, ce n’est pas une énergie très propre, mais les pays riches l’ont utilisée largement : au nom de quoi pourraient-ils empêcher aujourd’hui les nations du Sud de l’exploiter à leur tour pour se développer ? » a demandé le président Mahamadou Issoufou le 8 février dernier, lors du forum préparatoire Rio+20 tenu à Lyon (sud-est de la France) sous l’égide de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF).

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L’objectif est de s’assurer des réserves suffisantes, notamment pour alimenter les sites miniers existants en électricité (issue du charbon), ainsi que la centrale électrique d’une puissance de 200 MW en projet (dont le coût est estimé à 300 millions de dollars).

La Sonichar prévoit d’investir 1,72 milliard de F CFA (2,6 millions d’euros) sur trois ans à compter de la signature, soit d’ici à mi-2014. Ainsi que l’a indiqué l’an dernier le Premier ministre Brigi Rafini dans son discours de politique générale, « la diversification de la production minière se traduira par le redressement de la Sonichar et la mise en exploitation du gisement de charbon de Salkadamna », dans la région de Tahoua.

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Enfin, le pays espère signer cette année de nouveaux contrats d’exploration pétrolière et, peut-être, augmenter sa production, démarrée en novembre (lire article suivant). « Une dizaine de permis font l’objet de demandes de la part de plusieurs juniors pétrolières, elles sont à l’étude », explique Foumakoye Gado, le ministre de l’Énergie et du Pétrole. La route est encore longue mais l’État est bien décidé à s’affranchir de sa dépendance au yellow cake. 

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