Lorsque j’ai fait sa connaissance à N’Djamena en juin 2021, deux mois après son arrivée au pouvoir, Mahamat Idriss Déby Itno semblait encore flotter dans des habits trop grands pour lui, hésitant entre le battle-dress du général d’armée et le boubou soigneusement repassé que portait son père, le maréchal assassiné.
D’une sincérité désarmante, il reconnaissait que les évènements l’avaient porté comme une balle de ping-pong sur un jet d’eau, lui qui n’aurait jamais imaginé être un jour chef d’État. Le tout confessé d’une voix murmurée, comme s’il s’excusait de déroger à la traditionnelle pudeur tchadienne en parlant de lui-même. Je m’étais dit alors que ce “fils de” de 37 ans était sous l’étroite surveillance des crocodiles étoilés du Conseil militaire de transition (CMT) qui l’avaient placé à leur tête, et que sa longévité au pouvoir était une affaire de mois.