Burundi : pourquoi Évariste Ndayishimiye a nommé un nouveau Premier ministre

Le président burundais a annoncé le limogeage d’Alain-Guillaume Bunyoni, le très puissant Premier ministre, en nommant Gervais Ndirakobuca, lui aussi ancien maquisard et jusque-là numéro deux du gouvernement. Une façon, pour le chef de l’État, de s’affranchir de l’aile la plus dure de son parti, le CNDD-FDD.

Gervais Ndirakobuca, Premier ministre burundais, le 7 septembre 2022. © AFP.

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Publié le 8 septembre 2022 Lecture : 5 minutes.

À défaut d’un coup d’État, dont le président Évariste Ndayishimiye disait se méfier le 2 septembre, c’est un véritable coup de tonnerre qui vient de secouer Gitega et le microcosme du pouvoir burundais. En annonçant au matin du 7 septembre le limogeage de son Premier ministre, Alain-Guillaume Bunyoni, le chef de l’État burundais a surpris son monde.

L’ancien général a fait preuve d’un sens tactique très militaire pour se débarrasser de celui qui était considéré comme son plus sérieux rival depuis son accession au pouvoir en mai 2020, en ne mettant que quelques heures pour réussir une opération, semble-t-il, parfaitement préparée. L’ensemble des parlementaires burundais a ainsi reçu un message, tard dans la nuit du 6 septembre, leur demandant de se présenter dès 8 h 30 au palais de Kigobe, sans plus de précision. Ce n’est qu’une fois sur place, qu’ils apprennent qu’ils ont été convoqués pour entériner la décision du chef de l’État de remplacer son Premier ministre.

Le décret est alors très vite approuvé à l’unanimité et à main levée par les 113 parlementaires, avant d’être dans la foulée validé, là encore à l’unanimité, par le Sénat. La présidence pouvait donc officialiser en tout début d’après-midi, dans un communiqué des plus lapidaire, la nomination à la primature de Gervais Ndirakobuca, qui dans l’heure prêtait serment devant le président et l’ensemble des deux chambres parlementaires réunies.

Aile dure

Si la stupéfaction semble avoir été totale sur le moment, la décision d’Évariste Ndayishimiye était pourtant attendue depuis longtemps, tant le fossé entre le chef de l’État et son chef de gouvernement allait en s’élargissant au fil des mois. Pour beaucoup d’observateurs burundais et étrangers, Alain-Guillaume Bunyoni, plus haut gradé de la police et homme fort de l’appareil sécuritaire burundais pendant près de quinze ans, avait été placé à la Primature pour maintenir sous une surveillance étroite le président Ndayishimiye, au nom de la frange la plus dure du Conseil national de la défense pour la démocratie – Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD, au pouvoir). Les deux hommes ont plusieurs fois eu l’occasion d’afficher leur désaccord sur les questions de lutte contre la corruption ou de libéralisation de l’économie, vues d’un mauvais œil par un Premier ministre avant tout garant du système légué par l’ancien président Pierre Nkurunziza et dont il était l’un des principaux rouages.

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