Sophie Ménager : Les start-up et petites entreprises font face à un certain nombre d’obstacles qui freinent leur démarrage et leurs chances de réussite. D’une part, l’accès au financement leur est très difficile, car elles sont jugées trop jeunes et trop risquées pour avoir accès aux outils financiers traditionnels tels que les prêts bancaires ; d’autre part, ces entreprises n’ont en général pas encore les ressources nécessaires pour recruter les compétences métier ou en gestion d’entreprise qui vont leur permettre de grandir et de se structurer.
C’est pour répondre à ces défis, que nous avons créé à la fin de 2019, avec le soutien de l’Union européenne, le programme I&P Accélération au Sahel pour faire émerger des TPME innovantes, compétitives, et favoriser ainsi la création et le maintien d’emplois.
Quel bilan dressez-vous de ce plan et quels pays sont couverts à ce stade ?
Nous finançons 70 entreprises dans les pays où I&P est présent, à savoir le Burkina Faso, le Niger, le Mali, la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Cameroun, mais aussi au Tchad, au Ghana, et au Togo. Une récente évaluation démontre l’impact d’un tel programme, proposant aux entrepreneurs à la fois du financement sous forme d’avances remboursables (prêts à taux zéro), d’accompagnement stratégique et opérationnel et de l’assistance technique d’experts dans le but de renforcer le modèle économique, recruter un middle management et mettre en place des outils et process de gestion.
Les retombées pour les entreprises financées sont déjà considérables : validation du modèle économique, forte croissance annuelle du chiffre d’affaires (+60 % en moyenne) et du nombre d’employés (+50 %), amélioration des conditions de travail, mise en place d’une politique environnementale et sociale, levée de fonds additionnels, etc. À titre d’exemple, la Maison Fénel, basée au Burkina Faso et spécialisée dans la confection d’accessoires de mode à base d’étoffes tissées locales, a vu ses ventes bondir de +85 % sur un an.
Pensez-vous à étendre le programme à d’autres pays ?
Nous recherchons aujourd’hui des entreprises en Mauritanie, au Bénin, en Guinée et en Gambie, en complément des pays précédemment cités. Au-delà du programme I&P Accélération au Sahel, nous travaillons à déployer à terme des programmes de ce type à l’échelle continentale.
Notre objectif est d’accompagner 300 entreprises et de favoriser ainsi la création de 5 000 emplois au Sahel d’ici à 2023
Vous avez annoncé le lancement prochain de nouveaux fonds au Mali et en Ouganda. D’où vont proviendront les ressources et quels sont les montants visés ?
Ces fonds sont sponsorisés par I&P Développement, un autre programme d’I&P favorisant la création de fonds locaux d’investissement financés par des institutions financières de développement et des investisseurs privés (banques, fondations, etc.). I&P Développement prend une prise de participation minoritaire dans ces fonds, complétée par des investisseurs locaux et/ou internationaux.
Quels objectifs visez-vous pour I&P Accélération au Sahel, et plus globalement pour I&P ?
Ce programme à fort impact social vise à accompagner directement et indirectement, via les structures d’appui à l’entrepreneuriat et la création de fonds locaux d’investissement. Notre objectif est d’accompagner 300 entreprises et de favoriser ainsi la création de 5 000 emplois au Sahel d’ici à 2023. Le programme accorde une attention particulière au secteur de l’éducation et aux projets portés par des femmes et des jeunes de moins de 35 ans.
Réparti dans dix pays africains, I&P, qui fête ses 20 ans, rassemble plusieurs fonds d’impact visant à financer, à accompagner et à faire connaître les entrepreneurs qui transforment l’Afrique. Nous avons accompagné plus de 200 PME : des jeunes pousses – comme avec le programme I&P Accélération au Sahel – à des entreprises plus matures – avec les fonds d’investissements panafricains avec le programme I&P Afrique Entrepreneurs. L’objectif global d’I&P est de faire émerger 500 champions de l’entrepreneuriat durable et responsable en Afrique d’ici à 2030.
