Jusqu’au bout, la session de l’Assemblée nationale aura été agitée. Ce mercredi 15 juin, après un examen à huis clos du rapport de la commission spéciale et temporaire chargée d’examiner les cas d’absences non autorisées et non justifiées au cours des sessions de mars et septembre 2021, cinq députés ont vu leurs mandats invalidés. En d’autres termes, ils sont désormais tout simplement exclus de l’Assemblée.
Tous siègent dans l’opposition et trois sont membres du Front commun pour le Congo (FCC) de Joseph Kabila. Il s’agit d’Henri Mova Sakanyi, ancien ministre de l’intérieur sous Joseph Kabila ; d’Adolphe Muzito, Premier ministre de l’ancien président de 2008 à 2012, désormais en froid avec son allié Martin Fayulu ; de Papy Niango, initiateur d’une pétition au mois d’avril visant à destituer le président de l’Assemblée, Christophe Mboso ; du député Luc Munimbalimba ; et de Marie-Anne Mushobekwa, membre de la cellule de crise du Front commun pour le Congo (FCC) et une des voix très critiques vis à vis-à-vis de Félix Tshisekedi.
« Coup de fil de la présidence »
Dans un tweet, celle-ci s’est d’ailleurs élevée contre cette décision. Elle a justifié ses absence en expliquant que son mari et ses deux fils avaient été très malades du Covid-19, qu’ils avaient été hospitalisés dans une clinique et qu’elle avait présenté des « documents médicaux fiables » à la commission de l’Assemblée. Elle voit dans son invalidation une décision politique, assurant que « son nom a été ajouté après coup » à la liste des députés exclus « après un coup de fil en provenance de la présidence ».
La majorité de mes collègues de l'union sacrée présents dans la salle ont été SCANDALISÉS lrsq'on a cité mon nom pcq'ils me voient souvent aux plénières. Mon nom a été rajouté au manuscrit dans la salle après un coup de fil en provenance de la PRÉSIDENCE m'ont dit deux collègues.
— Mushobekwa Marie-Ange (@MushobekwaMa) June 15, 2022
Le parti de Joseph Kabila a quant à lui « condamné » une « décision injuste et irrégulière ». « Le FCC usera de toutes les voies possibles pour obtenir le rétablissement de ses députés », approuve Raymond Tshibanda, le coordonateur de la cellule de crise du FCC. Jaynet Kabila, députée et sœur jumelle de l’ancien Président, a elle aussi crié au scandale et dénoncé des « violations massives » de la Constitution et du règlement intérieur de l’Assemblée nationale.
Des précédents
Ces sanctions avaient déjà été utilisées par le passé, c’était alors en 2013, sous la présidence de Joseph Kabila à l’encontre de proche de son plus fervent opposant, Étienne Tshisekedi. L’assemblée nationale alors dirigée par Aubin Minaku, avait notamment invalidé le mandat de l’actuel président Félix Tshisekedi, d’Eugène Diomi Ndongala, et d’Antipas Mbusa Nyamwisi pour absence prolongée et non autorisée.
À l’époque, ces députés ne siégeaient pas suite à un appel de l’Assemblée lancé par Étienne Tshisekedi. Celui-ci voulait ainsi dénoncer une Assemblée « corrompue » et des résultats « truqués » de l’élection présidentielle de 2011.
Du côté du pouvoir, un député de la majorité estime que les personnalités visées « ne représentent rien ». « Ce sont tout de même des voix de moins pour l’opposition » lors des votes, reconnait-il néanmoins. Cette décision intervient alors que le débat politique est focalisé sur la situation dans l’Est de la RDC, où les attaques du M23 ont repris avec force et alors que Kinshasa dit voir derrière ces agressions la main rwandaise, ce que Kigali dément.