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Côte d’Ivoire : la norme « cacao durable » sème la pagaille

La mise en œuvre des normes européennes perturbe l’ensemble de la filière cacaoyère. Un véritable défi pour les autorités.

Par - à Abidjan
Mis à jour le 22 juillet 2022 à 10:49

Dans la plantation de M’Brimbo, village près de Tiassalé, à quelque 120 km au nord-ouest d’Abidjan, en avril 2021. © Photo by Issouf SANOGO / AFP

La Côte d’Ivoire, le numéro un mondial de la production de cacao, est mise sous pression par l’Union européenne qui représente plus de 67 % de ses exportations. En cause, une série de mesures en cours d’application depuis plus d’un an et qui prévoit de n’autoriser l’entrée sur le marché européen que des produits dont la chaîne d’approvisionnement respecte des critères préétablis comme la lutte contre la déforestation, l’amélioration des revenus des producteurs et la lutte contre le travail des enfants dans les plantations.

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Bien que le cacao ne soit pas la seule culture de rente visée, ce dispositif législatif cible l’or brun pour lequel, selon plusieurs rapports d’organisations non gouvernementales, les exploitations cacaoyères continuent leur extension dans les forêts protégées ou classées.

Nouvelles normes

Les exportations de cacao constituent l’une des premières sources de devises pour la Côte d’Ivoire. Le pays a jusqu’en 2024 pour appliquer de nouvelles normes à sa production de cacao, qui représente une récolte annuelle d’environ 2,4 millions de tonnes.

Certes, l’évolution de la production cacaoyère s’est faite au fil des ans au détriment de la forêt et de l’environnement. De 16 millions d’hectares de forêt au début des indépendances en 1960, le pays devenu premier producteur mondial de cacao en 1978, ne compte aujourd’hui que 3 millions d’hectares sur à peine 11 % de son territoire.

Reforestation tous azimuts

Or l’échéance pour se conformer aux exigences européennes inquiète. Alassane Ouattara, le président ivoirien, n’a pas caché son agacement en février dernier, lors d’un déplacement à Bruxelles, en marge d’un sommet Union européenne-Union africaine. « Si les Européens ne veulent pas acheter le cacao ivoirien, d’autres le feront à leur place », avait-il déclaré.

Mais loin de ces menaces, la Côte d’Ivoire s’est engagée dans un programme de reforestation tous azimuts et de traçabilité de sa récolte de cacao sur laquelle pèsent des soupçons de production dans les forêts classées et protégées. « L’initiative cacao durable » est menée depuis 2021 par le gouvernement ivoirien en partenariat avec l’UE. Toutefois, les défis sont énormes pour les autorités ivoiriennes qui doivent mobiliser quelque 616 milliards de francs CFA (939 millions d’euros) pour financer les projets liés à cette convention. Or ce financement n’est toujours pas bouclé, le gouvernement espère des contributions de bailleurs de fonds et des grands groupes du négoce du cacao.

Traçabilité

De son côté, le Conseil café cacao (CCC), organe public de gestion de la filière, a lancé un vaste programme de distribution de 60 millions de plants d’arbres. En lieu et place de destructions massives des plantations de cacao dans les forêts et réserves, le système d’agroforesterie a été adopté.

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« C’est une pratique qui consiste à planter des arbres dans les zones d’agricultures intensive. Des plants au nombre de 12 millions seront distribués jusqu’à la fin de l’année dans le cadre du projet de contribution à la reforestation dans les filières café cacao », précise Jérémie Kouassi Kan, chargé de développement à l’appui du secteur agricole du CCC.

Le gendarme du secteur a achevé le recensement des producteurs de cacao et a mis en place un système de traçabilité par géolocalisation de toutes les exploitations cacaoyères, en vue d’en extraire les récoltes issues des forêts classées et des réserves naturelles.