À Yamoussoukro, c’est comme si le temps s’était figé. Les grandes avenues désertes témoignent de l’ambition passée de Félix Houphouët-Boigny pour son village natal, qu’il avait érigé en capitale. En arrivant d’Abidjan, d’imposants bâtiments se détachent à l’horizon. Au loin, la coupole de la basilique, la plus grande du monde, se dresse fièrement. Et puis, il y a la Fondation Félix-Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix, construite dans les années 1980 et qui reste aujourd’hui encore ultra-moderne. Entouré de jardins, ce grand bâtiment abrite de nombreuses administrations et institutions.
Le hall d’entrée franchi, l’on se retrouve face à d’immenses colonnes. Tout au fond, trône un imposant portrait de l’ancien président. C’est là, à la fondation, qu’Augustin Thiam donne rendez-vous. Petit-neveu de Félix Houphouët-Boigny, il est aujourd’hui ministre gouverneur du district de Yamoussoukro, sur lequel il règne depuis son bureau du premier étage. Il a 69 ans, son costume bleu marine impeccable et son ton solennel lui donnent un air strict. Mais une fois passées les salutations d’usage dans la tradition baoulée, il se montre plus détendu. « J’ai le sens de l’humour et beaucoup d’autodérision. Il faut savoir rire de soi-même », dit-il. Dans le vaste bureau, un portrait d’Alassane Ouattara est accroché au mur.
Qui est le chef ?
En plus de représenter l’État dans la capitale ivoirienne, Augustin Thiam est, depuis une dizaine d’années, le chef du canton Akouè, une tribu baoulée. Au terme d’un long bras de fer coutumier, administratif et judiciaire qui l’a opposé à l’un de ses cousins, Augustin Dahouet-Boigny, qui réclamait la légitimité de la chefferie, la Cour suprême a tranché en sa faveur, en juin 2017. Mais Augustin Dahouet-Boigny continue de se proclamer chef. « Chez nous, la chefferie se transmet par la femme. L’héritier est l’enfant d’une sœur. Mon cousin qui revendiquait est l’enfant d’un fils. Il ne peut donc pas hériter », estime Augustin Thiam, désignant l’arbre généalogique qu’il a spécialement fait venir dans son bureau pour l’occasion.