Sénégal : le taux de fécondité entre cliché et réalité

Le dernier rapport de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie confirme la réduction significative du nombre d’enfants par femme sénégalaise depuis trois décennies.

 © Damien Glez

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Publié le 15 mai 2022 Lecture : 2 minutes.

« Quand des pays recensent encore sept à huit enfants par femme aujourd’hui, vous pouvez décider de dépenser des milliards d’euros, vous ne stabiliserez rien. » En 2017, le frais émoulu président français lâchait l’une des saillies qui lui valent une réputation d’arrogance. La polémique n’avait pas manqué de poindre à l’évocation d’un « défi de l’Afrique » jugé « civilisationnel ». Le journaliste du quotidien français Libération Balla Fofana avait invité Emmanuel Macron à épargner au « ventre des Africaines » les thèses des années 1950 sur une certaine surpopulation responsable d’un présumé sous-développement.

Baisse significative

Certes, le taux de fécondité africain reste le plus élevé de tous les continents et, effectivement, celui de certains pays frôle les 7 enfants par femme en âge de procréer. Pourtant, et sans ouvrir le complexe débat du lien vicieux ou vertueux – c’est selon – entre progéniture et richesse, ledit taux baisse significativement depuis une génération. De nouvelles données sénégalaises en attestent aujourd’hui.

Une chute vertigineuse d’un quart en seulement 33 années

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Au pays de la Teranga, le dernier rapport de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie indique ainsi que le nombre moyen d’enfants par Sénégalaise est passé de 6,4 en 1986 à 4,7 en 2019. Une chute vertigineuse d’un quart en seulement 33 années. Comme la méfiance à l’égard des clichés n’interdit pas certaines évidences, les causes de cette évolution étaient prévisibles : croissance de l’utilisation des méthodes contraceptives grâce à une meilleure information, un accès plus large ou l’évolution des mentalités ; espacement des naissances ; augmentation de l’âge lors du mariage et des premières grossesses, car de plus en plus d’enfants peuvent faire des études, notamment des filles ; participation d’un nombre croissant de femmes à des activités économiques à hautes responsabilités.

Les urbains, notamment, revoient leur stratégie procréatrice, considérant de moins un moins un enfant comme une garantie de ressources futures mais de plus en plus comme une gageure économique. S’observe alors le double effet de la scolarité des filles : elle retarde la procréation autant qu’elle dissuade la conception de petites sœurs ou de petits frères, même si la gratuité de l’école est promue parallèlement.

Le Sénégal est représentatif de l’évolution continentale du taux de fécondité. En 2017, l’Atlas de l’Afrique AFD annonçait que le nombre d’enfants par Africaine avait chuté de 6,6 à 4,5 depuis 1980. La baisse la plus spectaculaire concernait le nord du continent, où le taux avait été divisé par deux en 37 ans, passant de 6 à 3 enfants par femme. Subséquemment, la diminution du taux de croissance démographique de l’Afrique est engagée, même à un rythme légèrement plus lent qu’ailleurs. Pour autant, la baisse en valeur absolue de la population qu’expérimentent déjà certains pays occidentaux n’est pas à l’ordre du jour africain. Le nombre d’habitants du continent pourrait quadrupler d’ici 2100…

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