Politique

Côte d’Ivoire : les coulisses de la nomination d’Alain-Richard Donwahi à la COP15

Alassane Ouattara a choisi l’ex-ministre des Eaux et Forêts pour représenter la Côte d’Ivoire à la tête de la conférence de l’ONU, qui se déroule jusqu’au 20 mai à Abidjan. Une décision qui provoque des remous en plein scandale autour du trafic de bois.

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Mis à jour le 12 mai 2022 à 11:36

Alain-Richard Donwahi en mai 2017, à Abidjan. © SIA KAMBOU/AFP

Comme annoncé par Jeune Afrique, la nomination d’Alain-Richard Donwahi a effectivement été entérinée mercredi 11 mai, lors de l’ouverture officielle de la COP15. La Côte d’Ivoire accueillant cette édition, il était prévu qu’un de ses ressortissants préside la Conférence des parties sur la désertification et la sécheresse pour les deux années à venir.

Selon nos informations, Jean-Luc Assi, le ministre ivoirien de l’Environnement, avait confirmé dans la matinée du 10 mai aux Nations unies que cette personnalité serait Donwahi lors d’une réunion à laquelle l’ex-ministre participait. Cette décision avait été prise avant que ce dernier ne soit remercié du gouvernement, le 20 avril. Mais Alassane Ouattara a décidé de ne pas revenir dessus et a chargé Fidèle Sarassoro, son directeur de cabinet, d’en informer l’ONU le 22 avril.

« Sa nomination dérange »

Si les Nations unies ont officiellement pris acte du choix de la Côte d’Ivoire, certains de ses représentants s’en sont étonnés, estimant qu’il pourrait avoir un impact négatif sur la COP15. « Sa nomination dérange l’ONU et même certains membres du gouvernement, qui auraient souhaité que le chef de l’État revienne sur sa décision », précise une source onusienne.

L’ancien ministre des Eaux et Forêts a bien participé à une réunion préparatoire le 29 avril à la primature, avec le Premier ministre, Patrick Achi, ainsi que plusieurs ambassadeurs et membres du gouvernement, mais il n’y a toutefois pas été présenté comme le futur président de la COP15 et est resté en retrait.

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Si ce choix suscite autant la polémique, c’est parce que le ministère des Eaux et Forêts est aujourd’hui au cœur d’un scandale et que la gestion d’Alain-Richard Donwahi est fortement critiquée. Fin 2021, un vaste trafic de bois de Lingué, dont l’exploitation est interdite sur une bonne partie du territoire, avait été démantelé.

L’enquête a mis au jour la complicité d’agents des Eaux et Forêts, dont le chef et certains membres du cabinet de Donwahi. Ibrahim Lakiss, un exploitant forestier ivoiro-libanais décrit comme très proche de l’ancien ministre, a par ailleurs été arrêté. Poursuivi pour association de malfaiteurs, corruption, extorsion de fonds, déboisement sans autorisation du domaine forestier, blanchiment, enrichissement illicite et harcèlement moral, il est toujours en détention à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca).

Audit complet du ministère

Depuis début janvier, l’affaire est entre les mains de la Cour de cassation, qui poursuit ses auditions. À la demande du président ivoirien, l’Inspection générale d’État a en parallèle entamé, à la fin du mois de février, un audit complet du ministère des Eaux et Forêts, comme l’a révélé Jeune Afrique dans une enquête. Le 2 mai, l’ancien ministre a réagi dans un communiqué, dénonçant une « grotesque campagne d’intoxication ».

Organisée tous les deux ans, la Conférence des parties sur la désertification et la sécheresse (COP15) est la plus grande manifestation de l’ONU autour de la gestion durable des zones arides et de la protection de l’environnement des écosystèmes fragiles. Et le thème de cette édition, « restauration des terres dégradées et agriculture du futur », résonne tout particulièrement avec l’actualité ivoirienne.