En août, l’Angola va vivre les élections générales les plus disputées depuis la fin de la guerre civile, en 2002. Au sein du parti du président sortant, João Lourenço, les yeux se tournent avec inquiétude vers son rival, l’homme politique le plus populaire du moment : Adalberto Costa Júnior, charismatique leader du principal parti d’opposition, l’Unita, et candidat idéal des jeunes urbains, une catégorie en plein essor.
À bientôt 60 ans, il est un pur produit de l’Unita, dont il a rejoint les rangs à l’indépendance, en 1975. Cinq ans plus tard, il s’installera au Portugal où il gravira les échelons du parti pour en devenir le représentant dans l’ancien État colonisateur, place qu’il occupera jusqu’en 1996.
Cette année-là, le président d’alors, Jonas Savimbi, le nomme représentant en Italie et au Vatican. Les vidéos de l’époque montrent un jeune homme combatif, affûté, doublé d’un politicien habile.
Roi des réseaux sociaux
À la différence de nombreux acteurs politiques angolais, Adalberto Costa Júnior n’a pas combattu pendant la guerre civile. Un « défaut » que ne manquent pas de souligner les vieux caciques de l’Unita, contrariés par son aura. Il incarne également le double héritage de l’Angola, lui qui eut la nationalité portugaise jusqu’en 2019. Un pied de nez à la propagande diffusée depuis des décennies par le Mouvement populaire de libération de l’Angola (MPLA), qui prétend que l’Unita chasse les métis.
Ses discours enregistrent des milliers de vues sur les plateformes comme Youtube, Facebook ou WhatsApp
Après son retour en Angola en 2003, Adalberto Costa Júnior a commencé à se faire connaître grâce à ses analyses fines et percutantes au Parlement, à la télévision comme à la radio. Ingénieur de formation, il se livre alors à des interventions factuelles, nuancées, nourries d’accusations accablantes pour le MPLA au pouvoir. Ses discours enregistrent aujourd’hui des milliers de vues sur les plateformes comme Youtube, Facebook ou WhatsApp.
Dans les rangs du MPLA, tous les moyens sont bons pour étouffer la popularité de l’opposant, manipulation du système judiciaire comprise. En 2019, la Cour constitutionnelle a annulé le congrès de l’Unita qui avait porté Adalberto Costa Júnior à la tête du parti. Certains dissidents reprochaient alors à leur patron d’avoir renoncé à sa nationalité portugaise en dehors des délais impartis (selon les règles du parti, un candidat à la présidence ne peut avoir deux nationalités).
Mais le congrès a été organisé une deuxième fois, l’élection à la présidence du parti a eu lieu à nouveau, et Adalberto Costa Júnior l’a emporté avec plus de 90 % des voix. Un congrès cette fois-ci validé par la justice angolaise.
Réseaux à l’étranger
Le candidat à la présidence sait s’entourer et cultiver les alliances, notamment à l’étranger grâce aux rencontres organisées avec les partenaires de l’Unita. Il a des affinités avec la classe politique européenne, qu’il a rencontrée à plusieurs reprises. Il a récemment voyagé aux États-Unis pour obtenir le soutien des sénateurs et des groupes d’intérêt américains.
Fervent défenseur de la démocratie et de l’État de droit, il n’a pas encore complètement exposé son idéologie, ni son programme en matière de politique étrangère. Alors que le MPLA était un parti communiste imprégné d’idéologie socialiste (même s’il est, aujourd’hui, composé de capitalistes convaincus), l’Unita a récemment condamné l’invasion de l’Ukraine par la Russie. L’ambassade de Russie à Luanda a répondu publiquement par un blâme sévère.
Adalberto Costa Júnior a évidemment ses détracteurs, qui le jugent trop sûr de lui, arrogant, inexpérimenté…
Adalberto Costa Júnior a évidemment ses détracteurs, à l’extérieur mais aussi au sein même de son parti. Ils le jugent trop sûr de lui, arrogant, inexpérimenté… Certains membres de l’Unita ont même été exclus pour avoir critiqué leur président. Ainsi en est-il de José Pedro Kachiungo, l’un des opposants à Costa Júnior lors du congrès pour la présidence du parti en 2019, accusé de « conspiration »…
Mais il est un rival sérieux pour le chef de l’État sortant, João Lourenço, alors que le pays connaît des tensions croissantes sur fond de mécontentement de plus en plus visible à l’égard du parti au pouvoir. Quelle que soit l’issue du scrutin, une chose est sûre : Adalberto Costa Júnior comptera dans l’avenir proche de l’Angola.