Jusqu’alors numéro deux du Conseil national de sécurité, Jean-Claude Bukasa vient de prendre la suite de son chef. Celui qui était l’adjoint de François Beya en charge de la sécurité extérieure, a été nommé conseiller spécial du chef de l’État en matière de sécurité par intérim ce mardi 8 février.
Fonction oblige, peu de choses sont connues sur cet homme discret. Mais ce sécurocrate, qui s’est spécialisé dans la cybercriminalité lors d’un séjour au Canada, semble notamment avoir été choisi pour sa loyauté. Il est un militant actif de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), le parti du chef de l’État. Durant la campagne présidentielle de 2018, on a pu l’apercevoir aux côtés du candidat Tshisekedi dans certaines provinces.
« Sûreté de l’État »
Cette nomination d’un nouveau conseiller spécial du président en matière de sécurité vient confirmer la prolongation de « l’empêchement », selon le terme utilisé par le cabinet de Félix Tshisekedi, de François Beya. Il y a peu encore tout-puissant, le « monsieur sécurité » du président a été arrêté samedi 5 février et fait depuis l’objet d’une enquête de l’Agence nationale de renseignements (ANR).
« Il s’agit d’une affaire relevant de la sûreté de l’État », explique un communiqué lu à la télévision nationale par le porte-parole du chef de l’État. « Dans le cas actuel, on peut affirmer que les enquêteurs disposent d’indices sérieux attestant d’agissements contre la sécurité nationale. Les enquêtes se poursuivent. » La présidence de la République a également souligné que « les indices sont suffisamment sérieux et ne peuvent donner matière à d’autres considérations de nature ou de type tribal, clanique ou régional ». Sans révéler la nature de ces indices, le cabinet de Félix Tshisekedi ajoute que « le processus démocratique amorcé par la première passation pacifique du pouvoir en janvier 2019 est un acquis à préserver à tout prix. Aucune tentative de déstabilisation de nos institutions démocratiques ne sera tolérée ».
Guerre de palais
Depuis des mois, des collaborateurs de Félix Tshisekedi se livrent à une guerre de palais. Un bras-de-fer a d’abord eu lieu entre François Beya et certains proches collaborateurs du président dont Yane Fumuatu, l’assistant principal du conseiller spécial sécurité, en charge des questions politiques. Au terme de cette bataille, le 22 décembre 2020, Fumuatu a été suspendu avec interdiction de quitter le territoire pour insubordination, usurpation de qualité, trafic d’influence et indiscipline.
Récemment, c’est Fortunat Biselele dit « Bifort », le puissant conseiller privé du chef de l’État, qui a fait l’objet d’une convocation pour audition au sein du Conseil national de sécurité (CNS), alors chapeautée par Francois Beya, dans le cadre d’un conflit avec d’autres personnalités proches du président autour d’un carré minier.
« Une taupe »
Mais le rapport de force s’est inversé. Après cette convocation, François Beya a vu Jean-Hervé Mbelu Biosha être nommé nouveau patron de l’ANR, puis certaines de ses prérogatives être transférées à son rival. Les deux hommes s’étaient notamment affrontés en 2019 sur l’attitude à adopter après qu’un rapport a pointé que 15 millions de dollars destinés à compenser les sociétés pétrolières après le gel des prix à la pompe avaient été présument détournés. Alors que cette enquête visait, entre autres, Vital Kamerhe, à l’époque directeur de cabinet du président, Jean-Hervé Mbelu Biosha avait voulu saisir l’Inspection générale des finances. François Beya s’y était opposé.
Tandis que François Beya était accusé par certains d’être une « taupe » imposée par Joseph Kabila, Félix Tshisekedi reprend totalement le contrôle des services d’intelligence de RDC en nommant Jean-Claude Bukasa.