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Pourquoi Maïssa Bey écrit en français

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Mis à jour le 5 février 2007 à 17:35

« Née pendant la colonisation, j’ai appris le français à l’école. Mais le français est aussi ma langue paternelle. Mon père était l’un des rares instituteurs arabes à le maîtriser parfaitement. Il est mort en 1957 sous la torture, j’avais 6 ans, mais il a eu le temps de m’apprendre à lire et à écrire en français avant même que j’aille à l’école. Il m’a transmis cela comme quelque chose de très précieux, car, pour lui, la langue permettait d’aller vers l’autre, de le comprendre. La langue française est donc celle que j’ai reçue en héritage, une langue legs. C’est grâce à elle que j’ai eu accès au monde, à la culture. Après la période coloniale, j’aurais pu me tourner vers la langue arabe ou du moins m’y intéresser, mais j’ai appris l’arabe classique sur le tard. À la maison, nous parlions l’arabe algérien, qui est présent dans mes écrits, dans mes personnages. Je les entends, je les appréhende dans la langue populaire algérienne. Mon rapport à la langue française est un rapport d’amour. Je n’ai aucun complexe à écrire et à m’exprimer en français. L’essentiel est de pouvoir dire ce que j’ai à dire, ce que je ressens, mes colères et mes révoltes. Il n’y a pas de différence entre l’intime et l’écrit. »

Née en 1950 près d’Alger, enseignante de lettres dans l’Ouest algérien, Maïssa Bey a écrit plusieurs romans publiés en France par les éditions de l’Aube, notamment Cette fille-là (2001), Entendez-vous dans les montagnes (2002), Au commencement était la mer (2003), Sous le jasmin la nuit (2004) et Surtout ne te retourne pas (2005).