Deux des membres du top 5 mondial, le chinois Cosco Shipping Ports et le singapourien PSA International sont complètement absents du continent, si l’on exclut la participation minoritaire (20 %) de Cosco dans le grand terminal égyptien de Port-Saïd, à l’entrée nord du canal de Suez. Et le chinois Hutchison Ports, autre géant mondial, n’a pour l’instant pris pied que de manière substantielle en Égypte.
Le continent, future ex-raison d’être de Bolloré ?
L’Afrique est d’abord le terrain de chasse d’un groupe qui, côté portuaire, en a longtemps fait sa raison d’être, à savoir Bolloré. Le conglomérat familial français, dirigé par Vincent Bolloré, n’est présent dans les autres ports du monde que très marginalement (en Inde, au Timor et en Haïti, après être même sorti des ports français en 2019) alors qu’il est le leader incontesté du principal marché des concessions portuaires sur le continent, l’Afrique de l’Ouest. Le plus souvent, Bolloré a remporté les appels d’offres en association avec APM Terminals, la filiale portuaire du n°1 mondial (et en Afrique) du transport maritime de conteneurs, le danois Maersk.
Les deux groupes sont associés dans trois des ports ouest-africains au plus fort potentiel, Tema au Ghana, Pointe-Noire au Congo-Brazzaville, et Abidjan en Côte d’Ivoire, y compris dans le nouveau terminal en cours de construction dit TC2. APM Terminals, seul, domine lui au Maroc et plus précisément à Tanger Med, success-story portuaire africaine, où il dispose de deux des quatre terminaux.
APM Terminals a aussi un pied chez Bolloré à Conakry alors que le groupe français est prestataire du groupe néerlandais sur le terminal APMT de Monrovia. Les deux groupes n’ont connu qu’un seul revers, à Douala, où leur concession n’a pas été renouvelée le 1er janvier 2020. Mais le duo multiplie depuis les victoires judiciaires face au port autonome.
Seul le groupe public DP World, émanation directe de l’émirat de Dubaï, semble en mesure de rivaliser avec les deux leaders. Il a gagné, il y a quinze ans, Dakar face à Bolloré et, après le retrait in fine du lauréat initial CMA CGM, il a obtenu cette année l’une des dernières concessions attribuées, le terminal polyvalent de Luanda en Angola. Il essaye, par ailleurs, de percer sur le complexe marché de la RDC.

Exploitants de terminaux à conteneurs et rouliers en Afrique. © JA
Des intentions manifestées
DP World vient de mettre dans sa poche CDC Group, l’institution financière de la coopération britannique, pour booster ses projets dans trois de ses fiefs africains : Dakar, où le groupe émirati a été choisi pour développer le nouveau port de Ndayane, Berbera, son lot de consolation dans la desserte de l’Éthopie après avoir été évincé de Djibouti en 2018, et Sokhna, à l’entrée sud de Suez.
En dehors des opérateurs purement locaux dans les pays où le marché portuaire n’est pas encore ouvert, comme le géant public sud-africain Transnet ou l’autorité publique portuaire du Kenya, il reste encore quelques grands groupes mondiaux présents dans les ports africains.
CMA CGM, à qui l’on a prêté des intentions pour les intérêts de Bolloré malgré une certaine méfiance de son PDG, Rodolphe Saadé, mène un grand projet à Lekki au Nigéria, pour désenclaver Lagos, en plus de son implantation à Kribi aux côtés de Bolloré.
TIL, la filiale portuaire du n°2 mondial de conteneurs MSC, a tout misé sur Lomé au Togo où son succès est incontestable. Ses velléités de succéder au duo Bolloré-APMT à Douala semblent en revanche entravées par le maelstrom juridique en cours.
China Merchants Ports est lui aussi un acteur de poids mais souvent en discrète association, avec Bolloré à Lagos, TIL à Lomé, CMA CGM au Maroc (via leur coentreprise mondiale Terminal Link), ou comme partenaire minoritaire de l’État à Djibouti. Reste un dernier challenger à ne pas négliger, le philippin ICTSI que l’on retrouve quasiment dans tous les appels d’offres africains de ces dernières années.