Politique

RDC : ce que l’on sait de la visite nocturne des hauts représentants de l’État chez le cardinal Ambongo

Le Premier ministre, l’un des plus puissants conseillers de Félix Tshisekedi et les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat se sont rendus chez le patron de l’Église catholique congolaise, tard dans la soirée du 23 novembre. Une tentative d’apaisement, alors que les tensions étaient fortes entre l’État et le religieux.

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Par - envoyée spéciale à Kinshasa
Mis à jour le 24 novembre 2021 à 17:24

Fridolin Ambongo, à Kinshasa, le 24 décembre 2018. © MARCO LONGARI/AFP

Est-ce le premier acte d’une paix des braves ? Tard dans la soirée du mardi 23 novembre, une délégation de très haut niveau s’est rendue au domicile du cardinal Fridolin Ambongo à Kinshasa. Rien de moins que le Premier ministre, Sama Lukonde Kyenge, Christophe Mboso, le président de l’Assemblée nationale, Modeste Bahati Lukwebo, son homologue au Sénat, et François Beya, le puissant conseiller sécurité de Félix Tshisekedi, ont fait le déplacement chez le religieux.

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« C’est notre père spirituel, c’est notre gardien. Nous avons l’habitude de venir ici. Mais aujourd’hui, nous sommes venus par rapport aux rumeurs que vous entendez sur les réseaux sociaux, et nous sommes venus échanger. Tout a été clarifié », a déclaré Christophe Mboso au sortir de l’entretien, assurant qu’il « n’y a aucun problème entre l’État et l’Église ».

Fridolin Ambongo n’a pas dit autre chose : le cardinal s’est dit « honoré de recevoir les piliers [des] institutions ». « On écrit n’importe quoi sur l’Église, on écrit n’importe quoi sur le cardinal. C’était pour nous l’occasion de clarifier les choses et de repartir sur des bases nouvelles. »

Déclarations acerbes

Des mots doux et chaleureux qui ont de quoi surprendre. Ces dernières semaines ont en effet été marquées par des déclarations bien plus acerbes lors de la désignation du nouveau président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Les leaders catholiques et protestants ont pris la tête de la fronde pour tenter d’empêcher que Denis Kadima, qu’ils estiment être le candidat du président, prenne la tête de cette institution clé dans la perspective des élections de 2023.

Dans les colonnes de Jeune Afrique, Fridolin Ambongo avait eu des mots très durs à l’égard du chef de l’État et de son parti, l’Union pour la démocratie et le progrès social. « Pour l’UDPS, l’Église est l’ennemi à abattre », déclarait-il il y a moins d’un mois, estimant qu’il y avait « une sorte de fixation épidermique du pouvoir contre l’Église catholique ». Le cardinal dénonçait aussi « les insultes, les menaces, les intimidations » dont il était victime.

Pourquoi donc cet apaisement ? Dans le contexte très tendu qui a précédé et suivi la confirmation de la composition du bureau de la Ceni par Félix Thisekedi, il est possible que le religieux cherche à temporiser, sachant que le processus électoral doit se poursuivre avec, notamment, l’étude par l’Assemblée nationale de la loi électorale. Considère-t-il que l’élection de 2023 est encore loin et que la bataille de la transparence des élections est encore à mener ? S’est-il résolu à travailler avec Denis Kadima ?

Cette rencontre n’engageait en tout cas pas le reste des leaders catholiques et protestants. Un haut représentant de la Cenco confie que les déclarations du cardinal Ambongo n’étaient que « personnelles » et qu’elles n’étaient pas endossées par les autres membres de l’organisation.