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Une fête de Noël, cela ne se rate pas. Ce 23 décembre 1999, comme chaque année, Henri Konan Bédié a décidé de quitter Abidjan pour Daoukro, au centre du pays. Au fond, il n’y a que dans son village, entouré des siens et au milieu de ses immenses plantations, qu’il se sent vraiment bien.
Depuis l’aube, de jeunes soldats sont mécontents et des tirs résonnent dans Abidjan. Mais il n’y a pas de quoi déstabiliser le président : ils vont bien se calmer. C’est l’heure de la trêve et des grands festins, Bédié a hâte.
Il avait prévu de prendre la route et de distribuer des présents aux habitants tout au long de la nationale 1. Finalement, ce sera l’hélicoptère, décide-t-il à la dernière minute, c’est bien plus rapide. « Et les cadeaux ? » , s’enquiert Georges Ouegnin, l’historique directeur de protocole du palais. Les gens vont être frustrés. » « Chargez-vous-en », lui répond le président.
Demi-tour
Il est environ midi lorsque l’appareil décolle du palais. Cela fait des heures que le son des fusils sature l’air de la capitale économique mais, enfin arrivé sur sa terre natale, Henri Konan Bédié n’entend plus rien. Il s’attable. Le repas est insouciant et, comme toujours, bien arrosé. Champagne !
Depuis son bureau flambant neuf, Bédié entend les rafales, mais refuse toujours de voir les rebelles
La Côte d’Ivoire n’a de toute façon jamais connu de coup d’État. Pour le président, ce serait inimaginable. C’est vrai, il y a un peu de grogne, avec ce climat politique délétère et la crise économique, mais la veille, le 22 décembre, dans son traditionnel discours à la nation, Bédié s’est montré ferme et intransigeant. Cela aura remis tout le monde au pas. Ses ministres vont parler aux petits gars. Il n’y a eu qu’un seul mouvement d’humeur de soldats dans le pays depuis l’indépendance, en 1990, et il fut très vite résolu par Félix Houphouët-Boigny.
Sauf que Bédié n’est pas Houphouët.