Selon nos sources, Brice Laccruche Alihanga (BLA) ne souhaite pas faire appel de la décision du tribunal correctionnel de Libreville, qui l’a condamné le 29 octobre à cinq ans de prison et à cinq millions de francs CFA d’amende pour « obtention frauduleuse d’un document administratif ». La défense de l’ex-directeur de cabinet du président Ali Bongo Ondimba estime qu’une telle procédure serait inutile, les décisions de justice étant, selon elle, dictées par le pouvoir politique dans ce dossier.
BLA a été reconnu coupable d’avoir prétendu être le fils biologique du Gabonais Louis André Laccruche Alihanga, ancien conseiller d’Omar Bongo Ondimba, notamment en 2012 pour modifier son acte de naissance. Il est en réalité le fils naturel du Français Norbert Fargeon, le premier compagnon de sa mère. Le 26 octobre, BLA avait reconnu les faits devant le tribunal, affirmant toutefois considérer Louis André Laccruche Alihanga, qui l’a en effet élevé, comme son véritable père. Ce dernier, souffrant, n’avait pu se rendre à l’audience.
Interrogatoires multiples
L’ancien homme fort du Palais du bord de mer espérait obtenir la clémence du juge et écoper d’une « simple » peine avec sursis. Il prépare désormais sa défense pour un autre pan de son dossier, à savoir celui dans lequel il se voit accusé de détournements de fonds et de blanchiment d’argent. D’après nos informations, il a été entendu par la juge d’instruction Christine Tokouani à la fin du mois d’octobre et doit comparaître une nouvelle fois dans les prochains jours.
L’affaire pourrait ensuite être renvoyée devant la Cour criminelle avant la fin de l’année, ouvrant la voie à un éventuel nouveau procès. BLA refuse toutefois de se rendre à certaines convocations de la juge, dès lors que son avocat principal, Me Anges Kevin Nzigou, ne peut y être présent. L’accélération de l’instruction pourrait aussi avoir un impact sur le dossier du frère de l’ancien directeur de cabinet, Grégory Laccruche Alihanga, ancien maire d’Akanda.
Soupçonné de complicité de détournements et de blanchiment (en lien avec BLA, bien que leurs dossiers n’aient pas officiellement été joints), ce dernier est en prison à Libreville depuis le mois de novembre 2019, sous le régime de la détention préventive. Celle-ci ne peut cependant pas excéder deux ans. Sauf renvoi de son cas devant la Cour criminelle, le frère de BLA pourrait donc être remis en liberté dès le mois de décembre.
Une issue diplomatique ?
L’avenir de Brice Laccruche Alihanga pourrait également se jouer sur le plan diplomatique. L’ONU a en effet reconnu dans un avis datant de décembre 2020 que l’ancien directeur de cabinet du chef de l’État faisait l’objet d’une détention arbitraire. Si ses conditions d’incarcération se sont améliorées depuis, lorsqu’un nouveau directeur a pris fonction à la prison de Libreville, BLA est maintenu à l’isolement depuis son arrestation, en décembre 2019. Seul son avocat peut aujourd’hui lui rendre visite, contrairement à sa famille.
Une mission à Libreville du groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire attend d’être organisée depuis l’avis rendu fin 2020. Mais celle-ci, freinée par la pandémie de Covid-19, ne peut être effectuée qu’avec l’accord des autorités gabonaises. La défense de BLA s’active donc également à mobiliser les réseaux diplomatiques français, l’intéressé disposant en effet de la protection consulaire au titre de sa nationalité française.
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a été sollicité à plusieurs reprises par courrier – dont la dernière fois à la fin du mois d’octobre –, sans résultat probant. Les avocats de l’ancien bras droit d’Ali Bongo Ondimba comptent aujourd’hui sur la mobilisation de la déléguée pour les Français de l’étranger du Défenseur des droits, Brigitte Bonnaud, avec qui une rencontre à Paris est programmée dans les prochains jours.
Anges Kevin Nzigou a également prévu de s’entretenir avec le nouvel ambassadeur de France à Libreville, Alexis Lamek. Ce dernier, qui a posé ses valises au Gabon en août dernier, est en effet un fin connaisseur des arcanes et des instances onusiennes, ayant notamment occupé de 2017 à 2019 la tête de la Direction des Nations unies et des organisations internationales du ministère des Affaires étrangères français.