Économie

IFC : Aliou Maïga, un Malien au service de « l’Afrique des défis »

Parcours, philosophie de carrière, vision du continent… Rencontre avec le directeur régional pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale d’IFC, filiale de la Banque mondiale dévolue au secteur privé.

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Mis à jour le 28 octobre 2021 à 18:20

Aliou Maïga, directeur régional Afrique de l’Ouest et Afrique centrale d’IFC. © Aliou Maïga

Il est entré à la Société financière internationale – aujourd’hui renommée IFC – comme on entre dans les ordres. Par vocation. « Le développement et l’Afrique restent mes deux moteurs, car je suis attaché à l’impact de mon travail, à son utilité », explique Aliou Maïga, le directeur régional Afrique de l’Ouest-Afrique centrale d’IFC, filiale de la Banque mondiale axée sur le secteur privé . « Quel meilleur endroit pour travailler dans ces domaines qu’IFC ? », interroge-t-il.

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Le Malien, diplômé de Supélec, école supérieure d’ingénieur française, et détenteur d’un MBA à l’IMD de Lausanne, a intégré tôt dans sa carrière l’institution financière internationale. Après une première expérience de six ans au Crédit Lyonnais à Paris  et à New York, principalement dans l’IT, et un passage de deux ans et demi à Londres dans un cabinet de consulting (Booz-Allen et Hamilton), Aliou Maïga entre en 2001 au siège d’IFC à Washington (États-Unis) en tant que coordinateur de projets informatiques. Mais il se départ progressivement de sa casquette « IT » pour coiffer celles d’investisseur et de spécialiste des marchés émergents.

Pionnier sur le continent

À cette époque, le secteur financier sur le continent, et en particulier en Afrique de l’Ouest, est encore balbutiant. Aliou Maïga devient Investment officer en 2003 et contribue à accroître fortement l’activité d’IFC dans la région. « Nous sommes passés d’un programme annuel de 400 millions de dollars au début des années 2000 à près de 6 milliards de dollars pour l’Afrique en 2021 », souligne-il.

La carrière est la conséquence de ce qu’on réalise. Et non l’inverse

Avec une poignée de pionniers, Aliou Maïga œuvre au développement de l’empreinte d’IFC et à la stimulation de projets, viables économiquement, émanant du privé. Ce d’autant que l’ingénieur, devenu technicien du financement, gravit rapidement les échelons dans le groupe. « La carrière est la conséquence de ce que l’on réalise. Et non l’inverse », résume-t-il. C’est donc sans plan préétabli que pendant douze ans, à compter de 2008, il va occuper plusieurs postes à responsabilités dans divers endroits du globe, tels Addis-Abeba ou Hong Kong.

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De cette période, Maïga garde un souvenir particulièrement fort de son expérience en Asie. « Ces trois ans ont marqué un tournant dans ma carrière à IFC », confie-t-il. En tant que senior manager des marchés financiers d’Asie orientale et d’Asie-Pacifique, il supervise les opérations d’investissement du bailleur de fonds dans le secteur des services financiers et du capital-investissement. Il dirige une équipe de près de trente personnes pour un portefeuille global de plus de 2 milliards de dollars par an. « Alors que je ne connaissais rien aux mœurs de la région, les valeurs inculquées par ma famille, notamment de respect et de courtoisie, en plus de mon expérience professionnelle, m’ont permis de mener à bien cette mission », souligne-t-il.

Hétérogénéité de situations

Mais pour celui qui, dans un sourire, reconnaît qu’il n’avait, alors, jamais travaillé dans sa région d’origine – il a grandi entre Niafunké, Tombouctou et Mopti au Mali, avant de s’envoler pour Paris après le baccalauréat –, l’heure du retour ne tarde pas à sonner.

En 2014, il s’installe à Dakar en tant que directeur en charge du secteur financier pour l’Afrique sub-saharienne, pilotant une équipe de 60 personnes et un programme annuel de 1,2 milliard de dollars. Puis, à partir d’octobre 2018, il prend la tête du bureau régional pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale d’IFC, toujours à Dakar. « L’Afrique des défis », comme il qualifie lui-même la région, qui englobe aussi bien certaines nations à l’économie florissante que des pays du Sahel ou encore des États dont le sort est inextricablement lié au cours du pétrole ou à ceux d’autres matières premières.

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Une hétérogénéité qui est sans doute plus importante qu’ailleurs en zone subsaharienne, où IFC est représentée par deux autres directeurs régionaux, Kevin Njiraini pour l’Afrique australe et le Nigeria, et Jumoke Jagun-Dokunmu pour l’Afrique de l’Est.

Aussi complexe que « sa » région puisse être, elle n’a pourtant pas fini de susciter l’enthousiasme du dirigeant malien. Revendiquant un certain franc-parler dans la sphère professionnelle, il se garde bien toutefois de commenter la situation de son pays natal.

Makhtar Diop est un passionné qui a de grandes ambitions pour l’Afrique

Il préfère mettre en avant les derniers accomplissements d’IFC dans la zone : au Mali notamment, avec un soutien de 2 millions de dollars apportés à une usine de transformation de mangues ou encore un appui à la filière karité (le Mali est le deuxième producteur mondial de noix de karité), mais aussi au Gabon, à travers le financement du projet de barrage de Kinguélé, signé au mois de juillet.

Rappelant le fort engagement d’IFC dans les secteurs clés que sont l’agriculture et l’énergie, Aliou Maïga attend beaucoup de l’arrivée du Sénégalais Makhtar Diop à la tête de l’institution. « Un passionné qui a de grandes ambitions pour l’Afrique », affirme-t-il à son propos. Avant de conclure : « Je suis sûr qu’il peut faire la différence pour IFC. Et nous sommes là pour l’aider à réaliser ses ambitions ».