Politique

Sénégal : pourquoi les Wade ont claqué la porte de la coalition de l’opposition

Après des mois de tractations secrètes, le Parti démocratique sénégalais se retire du projet d’alliance contre Macky Sall pour les élections de janvier 2022. Une décision motivée par un revirement d’Ousmane Sonko et de Khalifa Sall.

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Mis à jour le 15 octobre 2021 à 12:02

Abdoulaye Wade, en février 2019. © SEYLLOU/AFP

Des mois de tractations et de rencontres pour finalement échouer au dernier moment. Le rêve de l’opposition de constituer un front uni contre Macky Sall s’est finalement heurté aux stratégies personnelles des leaders politiques. Les négociations avaient pourtant commencé très tôt, dès 2020.

Gracié par le chef de l’État en septembre 2019 après avoir été condamné pour détournement de deniers publics, l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall, amorce les discussions quelques mois après sa sortie de prison. Il contacte alors le Parti démocratique sénégalais (PDS) d’Abdoulaye Wade et le Pastef d’Ousmane Sonko pour leur proposer la formation d’une coalition afin de contrer le chef de l’État aux élections locales du 23 janvier 2022.

Les deux partis se montrent a priori favorables. Et le mouvement Taxawu Sénégal de Khalifa Sall décidera également d’adjoindre à l’alliance le Parti de l’unité et du rassemblement (PUR) de Cheikh Mouhamadou Moustapha Sy.

La « réunion secrète » de Sonko et Sall

Mais en avril 2021, face au retard pris dans les discussions, le PDS décide de retirer son accord de principe. Il faudra attendre août pour que l’initiative soit ravivée par Ousmane Sonko et que le parti de Wade revienne sur sa position. Les leaders conviennent alors d’une règle : négocier les conditions de leur coalition à quatre avant de l’ouvrir à d’autres membres. De quoi froisser certaines des formations de l’opposition, et en particulier les alliés de Pastef, qui s’étaient mobilisés lors de l’arrestation d’Ousmane Sonko en mars 2021.

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Le 20 août, Khalifa Sall convoque alors plusieurs de ces opposants mis de côté pour une réunion « secrète » au siège du Pastef, à Dakar. Seuls l’ex-maire de Dakar et Ousmane Sonko sont présents aux côtés de la députée et ancienne ministre Aïda Mbodj, du député Déthié Fall, Babacar Diop (FDS/Les Guelwaars), ou encore de Malick Gackou, président du Grand parti. Décision est alors prise d’intégrer leurs formations respectives dans la coalition, en dépit de ce qui avait été négocié entre les quatre alliés.

C’est d’ailleurs précisément ce jour-là que la création de la coalition devait enfin être annoncée. Mais compte tenu de cette nouvelle donne, Khalifa Sall et Ousmane Sonko repoussent la diffusion du communiqué. Le lancement de l’alliance, qui sera baptisée Yewwi Askan Wi, est pourtant annoncé à la presse le soir-même par Cheikh Mouhamadou Moustapha Sy, le responsable du PUR

Une autre coalition autour des Wade

Le PDS, qui n’a pas non plus été convié à cette réunion, publie le 1er septembre un communiqué dans lequel il dénonce les « jeux de l’ombre » et les « subterfuges inutiles » des autres responsables et assure ne pas avoir été informé de la signature d’une charte de la coalition. Il annonce donc se retirer du projet afin de créer sa propre alliance.

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La nouvelle formation, appelée « Wallu Sénégal », réunit le parti d’Abdoulaye Wade et plusieurs de ses alliés historiques : And-Jëf/Parti africain pour la démocratie et le socialisme (AJ-PADS), de Mamadou Diop Decroix, Bokk Gis Gis de Pape Diop, le CRD d’Abdoul Mbaye et Mamadou Lamine Diallo, et la coalition Jotna, portée par Abdoulaye Niane — celle-là même qui avait porté la candidature d’Ousmane Sonko lors de la présidentielle de 2019.