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Site d’extraction de pétrole, le long du fleuve Ogooué, au Gabon. © Daniel Riffet/Photononstop/AFP

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Afrique centrale : des progrès à pas comptés

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RDC-Congo : pourquoi le pont entre Kin et Brazza patine

Chiffré à plus de 400 millions d’euros pour sa première phase, le projet de pont entre les deux capitales congolaises n’en finit pas d’être repoussé. Les bénéfices attendus – commerciaux et portuaires notamment – sont pourtant importants, pour les deux côtés du fleuve et au-delà.

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Mis à jour le 4 novembre 2021 à 16:59

Le trafic annuel entre les deux capitales, actuellement d’environ 750 000 personnes, passerait à plus de 4 millions de passagers © DOM pour JA

Après des années de discussions, la République démocratique du Congo (RDC) et le Congo s’étaient enfin mis d’accord. Et tous, ou presque, de se réjouir à l’idée de voir se réaliser enfin un grand rêve : un pont au-dessus du fleuve Congo, entre les deux capitales les plus rapprochées du monde, doté d’une voie ferrée, d’une route à double ligne, de passages piétons et d’un poste de contrôle frontalier sur chaque rive.

Mais la pandémie de Covid-19 a joué les trouble-fête, obligeant à reporter la table ronde des partenaires techniques et financiers du projet prévue en mars 2020 à Brazzaville, pour un démarrage des travaux en 2021 et une inauguration en 2023.

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Plaque tournante

Dès le départ, le Congo s’est félicité de ce projet intégrateur, qui allait faire du pays et de sa capitale une plaque tournante sur la transafricaine n°3 (Tripoli-Brazzaville-Le Cap) et le corridor 13 entre Pointe-Noire, Bangui et N’Djamena.

Côté Kinshasa, les réticences émanent surtout de notables et d’élus du Kongo-Central qui craignent que le projet ne signe le déclin de leur province et du port de Matadi.

La première phase de réalisation du projet porte sur le pont à péage

Pour les autorités de RDC, il n’y a pas de problème, d’autant que celles-ci ont obtenu le prolongement du chemin de fer entre Kinshasa et Ilebo, port situé sur la rivière Kasaï, dans la province du Kasaï, et terminus de la voie ferrée qui mène à Lubumbashi. Ce qui permettra de relier les réseaux ferrés sud et ouest et d’accroître le trafic ferroviaire sur son corridor vers l’océan Atlantique.

Établissement de zones économiques spéciales

Reste à passer à l’acte, en réunissant d’abord la table ronde, sous la conduite de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (Ceeac), pour compléter les contributions de la Banque africaine de développement et d’Africa50, le développeur principal.

La première phase de réalisation de ce projet, structuré sous forme de partenariat public-privé, porte sur le pont à péage et sur la route jusqu’à Maloukou, côté Congo, et jusqu’à Maluku, côté RDC, les deux sites en amont des capitales, où seront établies des zones économiques spéciales (ZES). Soit un investissement de 413,7 millions d’euros.

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Le rail, dont le coût est plus élevé, ce sera pour plus tard. Aux 80 millions d’euros qu’ont nécessité les études, il faut ajouter 16,2 milliards d’euros pour la construction de la ligne de chemin de fer Kinshasa-Ilebo, longue de près de 1 000 kilomètres.

4 millions de passagers par an

Selon les estimations, le trafic, actuellement d’environ 750 000 personnes et 340 000 tonnes de fret par an, passerait à plus de 4 millions de passagers et à 3 millions de tonnes de fret. Dans un premier temps, c’est le port en eau profonde de Pointe-Noire, par lequel transite une partie des marchandises destinées à Kinshasa, qui devrait profiter du projet. La donne changera inévitablement après la construction de celui de Banana, dont le concessionnaire sera prochainement connu.

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À moyen terme, les zones situées entre le pont et chacune des capitales devraient voir émerger de nouvelles activités, notamment commerciales et de transport de passagers (bus, taxi). Le trafic fluvial entre les deux ports devrait être maintenu. Une aubaine pour ceux qui souhaitent passer rapidement d’un centre-ville à l’autre, pourvu que taxes et contrôles fantaisistes disparaissent à jamais.