Politique

Algérie : abolition des privilèges pour l’ex-épouse de Bouteflika à Paris

Peu de temps après son arrivée en France, en octobre 2020, l’ambassadeur d’Algérie Antar Daoud a mis fin aux privilèges dont bénéficiaient certaines personnalités de l’ancien régime, dont l’ex-femme du président déchu.

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Mis à jour le 2 mars 2021 à 17:11

L’ancien président Abdelaziz Bouteflika, en février 2012. © FAROUK BATICHE/AFP

Selon nos informations, l’ancienne épouse d’Abdelaziz Bouteflika, Amel Triki, ne fait plus partie du personnel diplomatique accrédité à l’ambassade d’Algérie en France, située au 50 rue de Lisbonne. Rappelée à l’automne 2019 au lendemain de la fin officielle de ses fonctions, elle n’avait pas souhaité quitter Paris, où elle s’était installée en 2001, après avoir été nommée secrétaire aux Affaires étrangères, avec des émoluments mensuels supérieurs à 5 400 euros.

Immunité, plaque diplomatique et loyer modéré

Sur demande de l’ambassadeur Antar Daoud, Amel Triki a dû restituer la carte diplomatique qui lui avait été délivrée selon l’usage par le Quai d’Orsay. Ce titre de séjour spécial lui ouvrait droit à une immunité, mais aussi à d’autres privilèges, conformément à la convention de Vienne de 1961.

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En revanche, elle n’a pas encore remis la carte d’immatriculation qui lui permettait de disposer d’une plaque diplomatique pour son véhicule. Or, tout diplomate qui n’exerce plus ses fonctions est tenu de restituer ces deux documents, qui doivent être retournés au Quai d’Orsay pour l’un et aux services des douanes pour l’autre.

Évidemment qu’Amel Triki occupait un poste de complaisance »

L’ex-épouse d’Abdelaziz Bouteflika avait également droit à un abattement à hauteur de 60 % de sa quittance de loyer. À l’ambassade, elle disposait d’un bureau qu’elle occupait presque jamais. Ceux qui la croisaient dans l’immeuble, où elle ne se rendait que très rarement, décrivent une femme correcte, distante et réservée. « Évidemment qu’elle occupait un poste de complaisance », glisse un diplomate qui l’a connue au sein de cette chancellerie.

Célibataire endurci, Abdelaziz Bouteflika avait 53 ans quand il a épousé Amel Triki en août 1990. De trente ans sa cadette, elle était la fille d’un diplomate algérien qui fut notamment en poste au Caire. Absente à la cérémonie religieuse, l’épouse n’a pas vécu avec son mari, qui vivait à l’époque dans son appartement d’El Biar, sur les hauteurs d’Alger.

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Peu de temps après l’élection de Bouteflika en 1999, son frère Saïd a été dépêché à Paris pour la ramener en Algérie, après la fin de ses études. Elle s’est installée dans la grande villa qu’occupait sa belle-mère, passait ses journées à palabrer avec cette dernière, mais ne vivait pas avec son époux. Lasse de ce ménage insolite, elle est rentrée à Paris pour refaire sa vie avec un Égyptien, avec lequel elle a eu trois enfants.

Le « cas » Bedjaoui

Ancien ambassadeur d’Algérie à Paris dans les années 1970 et ministre des Affaires étrangères de 2005 à 2007, Mohamed Bedjaoui était quant à lui conseiller diplomatique à l’ambassade d’Algérie jusqu’en janvier dernier. Ce poste, qui s’apparente à un emploi fictif, lui rapportait encore récemment 9 000 euros par mois. L’ambassadeur Antar Daoud a également décidé de procéder au retrait de ses cartes diplomatique et d’immatriculation.

Mohamed Bedjaoui n’avait pas de bureau à l’ambassade et ne venait que très rarement »

Mohamed Bedjaoui n’exerçait aucune activité diplomatique en échange de ce poste, qui lui avait été accordé lorsque Bouteflika était au pouvoir. « Il n’avait pas de bureau à l’ambassade et ne venait que très rarement », se souvient un diplomate.

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Le nom de Mohamed Bedjaoui a été cité dans le cadre du scandale de l’autoroute Est-Ouest, dont l’instruction est encore en cours à la Cour Suprême. La justice reproche à l’ex-ministre des Affaires étrangères son « appui » à l’homme d’affaires et marchand d’armes français Pierre Falcone, lorsque celui-ci avait présenté, au nom du groupement chinois Citic-CRCC, une offre dans le cadre du marché de l’autoroute. L’attribution de ce marché aurait donné lieu des versements de commissions qui se chiffreraient en dizaines de millions de dollars.