Culture

Burkina Faso : musique au musée

Au cœur de Ouagadougou, le musée Georges-Ouédraogo met en avant la musique du Burkina Faso, ses instruments et leur rôle au sein des communautés. Un patrimoine vivant particulièrement bien orchestré.

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Par - Envoyée spéciale à Ouagadougou
Mis à jour le 6 mai 2021 à 09:21

Mahamadi Ilboudo, le conservateur du musée de la Musique de Ouagadougou, le 17 février 2021.

Sur l’avenue du Capitaine-Thomas-Sankara, à Ouagadougou, un curieux bâtiment attire l’attention. Conçu à l’origine pour abriter le centre d’études sur les matériaux locaux, il sert d’écrin, depuis 1999, au musée de la musique Georges-Ouédraogo qui, après sa rénovation de 2007 à 2013, est de nouveau accessible au public.

Avec son architecture tout en harmonie, aux formes rondes faite de voûtes et de coupoles, le musée allie esthétique et fonctionnalité grâce à l’utilisation de matériaux locaux, comme le bois et les briques en terre compactée et stabilisée, qui régulent la température. Des ouvertures aménagées dans le toit offrent un éclairage naturel à l’intérieur du bâtiment, auquel les coupoles confèrent par ailleurs une acoustique particulière.

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Consacré aux instruments traditionnels et à l’histoire de la musique du Burkina, le musée possède une collection de plus de 300 objets venant des quatre coins du pays et représentant les différentes familles d’instruments : aérophones (comme la flûte), cordophones (tel le kundé), idiophones (les castagnettes) et les membranophones (notamment le tambour).

La kora de Boureima Traoré

Les équipes du musée effectuent des missions préparatoires auprès des communautés afin de répertorier et de comprendre la fonction des instruments, puis elles organisent la collecte des objets identifiés, que le musée acquiert généralement en les achetant. « Nous faisons comprendre [aux communautés] que c’est le lieu idéal pour que leur instrument continue à vivre et soit vu par différents publics », explique Mahamadi Ilboudo, le conservateur. C’est ainsi que la kora de Boureima Traoré, membre du mythique Volta Jazz, trône fièrement dans la salle réservée aux cordophones. « Il voulait que les gens connaissent l’histoire de cet instrument », ajoute Mahamadi Ilboudo.

Le musée de la musique Georges-Ouédraogo, à Ouagadougou. © Olympia de Maismont pour JA

Le musée de la musique Georges-Ouédraogo, à Ouagadougou. © Olympia de Maismont pour JA

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Ces accessoires participent à tous les aspects de la vie sociale : mariages, funérailles, guerres, travaux champêtres, etc. Ainsi, en cheminant au gré des sept salles d’exposition communiquant les unes avec les autres, les visiteurs peuvent découvrir le grand balafon-autel du pays dagara, dans la province de la Bougouriba (sud-ouest). Fait de bois, de peau et de calebasse, il est surtout utilisé lors de rites funéraires. Des personnes exécutent des pas de danse autour de l’instrument, formulent des vœux et, une fois ceux-ci exaucés, doivent revenir pour faire des offrandes sur ce balafon-autel réputé avoir des pouvoirs mystiques.

Des masques en fibres de la Terre de  Bwa. © Olympia de Maismont pour JA

Des masques en fibres de la Terre de Bwa. © Olympia de Maismont pour JA

Dans une autre pièce, les golbies suscitent la curiosité. Chez les Siamou de Orodara, ces deux tambourins sont utilisés uniquement par des femmes ménopausées pour annoncer le décès de personnes âgées.

Expérience numérique

Les vernissages d’expositions temporaires sont aussi l’occasion d’inviter les communautés à investir le musée pour y montrer certains pans de leur culture. En octobre 2020, des musiciens bwabas ont joué sur des instruments traditionnels lors de l’exposition photographique « Patrimoine vivant – masques de feuilles en pays bwaba », encore visible actuellement. « Nous avons une relation particulière avec les publics scolaires à travers le programme “la classe au musée” , ajoute Mahamadi Ilboudo. C’est une éducation au patrimoine, à travers différents supports. »

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Depuis quelques années, le Burkina tente de développer le tourisme interne. « Avec le terrorisme et le Covid-19, il y a moins de voyageurs internationaux et la fréquentation du musée n’a été que de 1 734 visiteurs en 2020 », regrette Mahamadi Ilboudo. L’établissement se lance également dans l’expérience numérique. En mai 2021, en partenariat avec l’École du patrimoine africain (dont le siège est au Bénin), le conservateur inaugurera une exposition virtuelle sur l’histoire musicale du Burkina Faso.