« Nous avons décidé souverainement de nationaliser les hydrocarbures ». C’est par cette formule directe que le président algérien Houari Boumediène annonçait le 24 février 1971, il y a cinquante ans aujourd’hui, la décision de reprendre la main sur la production de gaz et de pétrole, l’une des principales sources de revenus de l’Algérie indépendante dont une bonne part était encore sous contrôle français.
Lors de son discours prononcé au siège de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), dont on fêtait ce jour-là le quinzième anniversaire, le président ajoutait qu’il s’agissait « de porter la révolution dans le secteur du pétrole et de concrétiser les options fondamentales [du] pays en ce domaine ». « Il serait plus équitable, pour les investissements dans la recherche pétrolière, poursuivait-il, que les profits réalisés dans notre pays soient au moins dépensés sur place ! »
Secteur stratégique
Le président de la jeune république fraîchement émancipée n’en faisait pas mystère : en donnant ainsi leur congé à Elf (Erap à l’époque) et Total, il parachevait la lutte contre la tutelle coloniale et pour la souveraineté pleine et entière de son pays. La décision n’était d’ailleurs qu’une conclusion : en 1968 déjà, les sociétés américaines avaient été contraintes de céder le contrôle à Alger. Le bras de fer avec les compagnies françaises était naturellement plus symbolique et plus complexe, il avait donc duré un peu plus longtemps.
Le processus de prise de contrôle par l’État algérien des principaux secteurs économiques – en particulier les industries extractives – avait en vérité débuté peu de temps après l’indépendance de 1962, au terme de laquelle était reconnue la souveraineté du pays sur le Sahara et ses ressources naturelles. En 1966, les autorités avaient ainsi nationalisé les mines, le fer, le phosphate, le plomb, le zinc et le marbre. En 1967, ce fut le tour des grandes compagnies étrangères présentes dans le secteur des services : banques, assurances, transports…
Alors que Total et Elf contrôlaient à elles deux 67,5 % du périmètre d’exploitation du gaz et du pétrole dans le pays, Alger n’en détenait que 4,5 %