Politique

Algérie : qui est Nour-Eddine Mekri, le nouveau patron du renseignement extérieur ?

Surnommé « Mahfoud Polisario » en raison de son expertise sur le dossier sahraoui, il doit rétablir l’efficacité d’un service crucial dans le contexte de tensions aux frontières.

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Par et
Mis à jour le 23 janvier 2021 à 17:43

Nour-Eddine Mekri, dit « Mahfoud » (à droite). © DR

Le général-major Mohamed Bouzit, dit Youcef, n’aura pas réussi son come-back. À peine neuf mois après son installation à la tête de la Direction de la documentation et de la sécurité extérieure (DDSE), il a été remplacé le 20 janvier par le général-major Nour-Eddine Mekri, alias « Mahfoud », rappelé aux fonctions après plus de cinq années de retraite.

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Le général « Mahfoud » est né dans les années 1950 à Mascara dans l’ouest du pays. Il fait partie de la génération d’officiers post-Indépendance qui ont rejoint l’Armée nationale populaire (ANP) pour servir au sein des services de renseignement, qui s’ouvraient alors aux universitaires. Ayant étudié les relations internationales, il avait été rattaché aux services de renseignement extérieur de l’ancienne Sécurité militaire, où il fera le début de sa carrière en tant que chargé d’études avant d’occuper plusieurs postes sur le terrain en Europe et en Afrique.

« Mahfoud Polisario »

Sa maîtrise du dossier du Sahara occidental, qu’il a directement suivi notamment à travers des séjours prolongés à Tindouf (près de la frontière algéro-marocaine), lui vaut parfois le surnom de « Mahfoud Polisario ». Interlocuteur estimé des dirigeants du Polisario, il a eu tout au long de sa carrière à collaborer et à côtoyer les milieux diplomatiques, desquels il est apprécié.

Dans les années 1980, Nour-Eddine Mekri collabore étroitement avec Mohamed Seddik Benyahia, ministre des Affaires étrangères et artisan de la libération des otages américains détenus en Iran. Le ministre a trouvé la mort en 1981, quand son avion a été abattu par un missile irakien alors qu’il était en mission de bons offices dans le conflit entre l’Irak et l’Iran. Il reste marqué par son passage aux côtés de Benyahia dont il garde des souvenirs mémorables. « Mahfoud » a également connu des passages notables dans les structures de formation telle que l’Institut des hautes études de sécurité nationale, qu’il a dirigé au début des années 1990.

Il a pu nouer des contacts professionnels et personnels utiles avec toute la hiérarchie militaire

Sa carrière bifurque le 10 septembre 2009 lorsqu’il est nommé Directeur central au ministère de la Défense nationale, chargé des relations extérieurs et de la coopération (DREC). Ce poste à la tête de la DREC est stratégique car il permet à son chef de nommer et diriger l’ensemble des attachés de défense algériens en poste à l’étranger, d’assister les délégations militaires étrangères en visite en Algérie et de garder un œil sur les représentations diplomatiques dotées de bureaux militaires à Alger.

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Il a, dans ce cadre, eu à surveiller les achats d’armes car les dossiers transitent généralement par les bureaux militaires algériens à l’étranger. Il a ainsi pu nouer des contacts professionnels et personnels utiles avec toute la hiérarchie militaire.

Proche de « Toufik »

En 2015, il paie cher sa proximité avec le général Mohamed « Toufik » Mediène – dont il est très apprécié – dans le contexte du démantèlement du Département du renseignement et de la sécurité (DRS) débuté en 2013 et achevé avec le départ de « Toufik » en 2015, quelques jours avant la mise à la retraite forcée, le 20 septembre 2015, de « Mahfoud ». Ce dernier est alors une victime collatérale du conflit entre « Toufik » et Ahmed Gaïd Salah (décédé en décembre 2019), à l’époque vice-ministre de la Défense et chef d’état-major, qui le limoge sans ménagement.

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Il aura pour mission – son parcours lui en offre la possibilité – de rétablir des canaux de coordination plus étroits et plus efficaces entre l’appareil diplomatique, l’institution militaire et les services de renseignement extérieur. Il aura fort à faire pour rendre au service de renseignement extérieur, qui a pâti du départ de « Toufik », son lustre et son efficacité, dans un contexte de tensions aux frontières algériennes, entre la question sahraouie, la crise libyenne et les infiltrations terroristes depuis le Sahel.