[Chronique] Le « coup d’État » de Trump, digne d’un despote africain

L’intrusion au sein du Capitole de partisans pro-Trump, chauffés à blanc par le président américain sortant, rappelle les débâcles électorales africaines que les États-Unis aiment tant critiquer.

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Publié le 7 janvier 2021 Lecture : 3 minutes.

Sur un cliché viral, un homme pose un pied frondeur sur un meuble où se prennent des décisions parmi les plus importantes de sa nation. S’agit-il d’un Burkinabè qui outrage le domicile de François Compaoré, après l’insurrection qui a chassé son frère du pouvoir ? Non, il s’agit de Richard Barnett, citoyen venu de l’Arkansas, photographié dans le bureau de Nancy Pelosi, la présidente évacuée de la Chambre des représentants des États-Unis.

Coup de force

Sous les yeux de journalistes abasourdis, un chef d’État officiellement battu rejette publiquement les résultats officiels. S’agit-il du Gambien Yahya Jammeh qui s’accroche au pouvoir ? Non, il s’agit de Donald Trump qui chauffe à blanc ses partisans, devant le Congrès américain.

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Du gaz lacrymogène se répand dans le bâtiment qui sert de siège au pouvoir législatif. S’agit-il d’une bagarre rangée entre pro-Kabila et pro-Tshisekedi à l’Assemblée nationale de RDC ? Non, il s’agit de l’invasion de la rotonde du Capitole, à Washington, par des militants républicains.

Sur les chaînes d’information en continu, des présentateurs demandent à des experts d’évaluer le risque d’un putsch militaire ? Mali ? Guinée-Bissau ? Centrafrique ? Non, c’est aux États-Unis que plusieurs élus et des journaux comme le Washington Post dénoncent une tentative de « coup d’État ».

Ce mercredi 6 janvier, non loin d’un président sortant vindicatif, des partisans de Donald Trump ont investi de force le Congrès réuni pour entériner la victoire de Joe Biden. La séance est interrompue, la Garde nationale mobilisée en renfort et plusieurs bâtiments évacués. Blessée par balles, une manifestante, Ashli Babbitt, décède. Et la maire de Washington décrète un couvre-feu à compter de 18 h.

Pas d’excuses

On ressemble souvent à ceux que l’on snobe. Et on les snobe parfois pour exorciser des ressemblances que l’on refuse d’admettre. Quand il n’ignorait pas tout bonnement le continent africain, le président le plus improbable des États-Unis aimait lancer des piques à ces « shitholes countries », considérés comme des adolescents attardés des processus démocratiques, envieux d’une Amérique prétendument « great again ».

C’est l’hôpital américain qui se moque de la charité africaine

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Deux mois après le scrutin qui a désigné les grands électeurs américains et après toutes sortes de recours légaux ou prohibés, c’est l’hôpital américain qui se moque de la charité africaine. Après que le système a révélé, en 2000 et en 2016, le divorce entre arithmétique électorale américaine et vote populaire, c’est une mouvance non négligeable de l’opinion nationale qui interroge la Constitution « We the people », quasiment inchangée depuis 234 ans. Or, l’Amérique du repli sur soi et des fake news débridées n’a pas l’excuse de l’inexpérience démocratique de l’Afrique.

Scission chez les Républicains ?

Les Occidentaux considérant qu’à « quelque chose malheur est bon », et les Africains renchérissant que quand « le canari se casse sur ta tête, il faut en profiter pour te laver », le mérite de ce baroud d’honneur trumpiste sera peut-être de surligner la nocivité d’une idéologie faite de virilisme autocentré, de manque de compassion et de déontologie plus qu’approximative.

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Maintenant que l’affidé vice-président Mike Pence ne s’oppose plus à la certification de la victoire de Joe Biden, le parti républicain commence une introspection, effrayé par la menace d’une scission. Et toute ressemblance avec un Front populaire ivoirien ou un MODEN/FA Lumana nigérien serait fortuite…

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