Politique

Centrafrique : la stratégie de Bozizé pour vaincre Touadéra

Réfugié dans sa région natale de Bossangoa, François Bozizé affirme que sa tête a été mise à prix par Faustin-Archange Touadéra. Voici comment, entouré d’une poignée de militaires, il élabore sa stratégie pour vaincre son ancien Premier ministre.

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Mis à jour le 7 janvier 2021 à 16:00

François Bozizé, le 9 novembre 2020. © Pacôme Pabandji pour JA

Selon nos informations, François Bozizé n’a pas quitté sa région d’origine de Bossangoa – (la « Cité des pierres dures », en langue gbaya) – située dans l’Ouham, dans le nord-ouest du pays. Si des rumeurs l’ont envoyé au Cameroun ou au Congo-Brazzaville, l’ancien président n’a en réalité pas fui la Centrafrique. S’estimant pourchassé, il change toutefois très fréquemment de lieu de résidence, par mesure de sécurité.

« Il est seul »

Entouré d’un nombre réduit de soldats de sa garde personnelle, qui lui avait été assignés par l’État lors de son retour au pays fin 2019, François Bozizé s’est en revanche séparé de ses collaborateurs civils, comme Jean-Eudes Teya, le secrétaire général de son parti Kwa na Kwa (KNK), ou son propre fils, Jean-Francis Bozizé. « Il est seul », affirme l’un de ses lieutenants.

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Toujours selon nos informations, l’ancien chef de l’État a invité ses proches à se mettre en sécurité de leur côté depuis le lancement des opérations militaires de la Coalition des patriotes pour le changement (CPC, groupes armés), qu’il soutient. Ses derniers fidèles l’ont quitté peu avant le premier tour de la présidentielle du 27 décembre, tandis que la plupart de ses conseillers avaient été renvoyés au moins une semaine plus tôt.

En contact régulier avec les groupes armés

L’ancien président est lui-même convaincu d’être pourchassé par des hommes du président Faustin-Archange Touadéra, en particulier depuis que des individus armés ont incendié son domicile et saccagé celui de sa mère à Bangui. L’un de ses proches collaborateurs, contacté par Jeune Afrique, affirme même que sa tête a été mise à prix pour 150 millions de francs CFA.

François Bozizé est en contact régulier avec les principaux cadres de son parti, notamment Christian Guénébem, son ancien directeur de campagne et artisan principal de l’éphémère alliance politique avec l’opposant (arrivé second le 27 décembre) Anicet-Georges Dologuélé, lequel conteste également la réélection de Touadéra. Sur le plan politique, le KNK demande, comme toute l’opposition, l’annulation du scrutin présidentiel.

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L’ex-chef de l’État échange surtout régulièrement avec les leaders de la CPC, Abbas Sidiki, Ali Darassa, Mahamat Al-Khatim, Noureddine Adam ou Maxime Mokom, par ailleurs son neveu. Ces derniers, dont les troupes ont attaqué Grimari, Damara ou encore Bangassou, tentent toujours d’encercler Bangui. Ils espèrent nouer une alliance officielle avec le patron du KNK, lui proposant un rôle similaire à celui de Michel Djotodia au sein de la Séléka en 2013.

La coalition, qui a désigné comme porte-parole l’ancien directeur général de la Socatel, Serge Bozanga, a créé un bureau de coordination afin d’accorder les stratégies de ses différentes ailes, issues des anciens mouvements Séléka et anti-balaka. Cet organe est en lien étroit avec François Bozizé, lequel, accusé par le gouvernement de diriger en sous-main la CPC, est la cible d’une enquête de la justice centrafricaine pour rébellion.