« Président pour toujours »
C’est le slogan que Yoweri Museveni s’était choisi lors de la précédente élection, et il avait le mérite de la clarté. Cette fois-ci, le chef de l’État sortant a opté pour une formule plus sobre (« Garantir votre avenir ») mais l’issue du scrutin en sera vraisemblablement inchangée. Peu enclin à prendre sa retraite, Museveni a fait sauter le verrou constitutionnel des deux mandats en 2005, puis supprimé en 2017 la limite d’âge, alors fixée à 75 ans, pour briguer la magistrature suprême.
Mzee
Arrivé au pouvoir à la suite d’un coup d’État en 1986, après avoir passé des années dans la clandestinité, Museveni a su raviver l’éclat de la « perle de l’Afrique », terni par des années de violence, en ramenant stabilité et croissance. Sous sa gouvernance, l’Ouganda renoue avec la stabilité et la croissance économique. Son armée – appuyée par l’Union africaine et les États-Unis – parvient également à chasser du pays les rebelles de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA, de Joseph Kony).
Mais à 76 ans, le « Mzee » (« le sage », en swahili) ne remporte plus l’adhésion d’antan, en particulier auprès des jeunes, largement majoritaires dans le pays.
Rwitabagomi
« Celui qui abat les plus têtus », en français. C’est le surnom que le chef de l’État a donné à son fusil, un AK-47 qu’il garde souvent près de lui. La légende veut qu’il le place sous son lit lorsqu’il dort. Un souvenir de ses années dans le maquis ?
Formé à la guérilla dans le Mozambique des années 1970, Museveni a conservé le goût des treillis et de la discipline militaire. Il s’inspirera du Front de libération du Mozambique (Frelimo) pour créer son propre mouvement de résistance, la National Resistance Army (NRA), et sa branche politique, le National Resistance Movement (NRM), actuel parti présidentiel.
Ancien marxiste
C’est dans la Tanzanie socialiste de Julius Nyerere qu’il fait son apprentissage politique. De 1967 à 1970, il étudie les sciences économiques et politiques à l’université de Dar es-Salaam et baigne dans les idéaux socialistes de l’époque. Il y prendra la tête d’un groupe d’étudiants de gauche, proche des mouvements de libération africains.
Bon élève
Sous la pression de ses partenaires occidentaux, Museveni reniera par la suite ses idéaux pour se soumettre aux contraintes libérales. Soutenu par les États-Unis, qui voient en lui un gage de stabilité, il pourra compter sur l’appui du FMI et parviendra à redresser l’économie ougandaise.
Gentleman farmer
Museveni aime le rappeler, il est avant tout un éleveur. Né en 1944 à Ntungamo, dans le sud-ouest du pays, il est placé sur une vache à sa naissance, comme il est d’usage chez les Bankyankole Bahima.
Aujourd’hui encore, il n’est pas rare qu’il fasse le trajet jusqu’à l’une ou l’autre de ses fermes. Il aime à donner des nouvelles de son troupeau, dont il est très fier et dont chaque bête produirait, selon ses dires, près de 25 litres de lait par jour. Il n’hésite pas non plus à dispenser ses conseils en matière d’élevage.
Dynastie
Son frère, Salim Saleh, général à la retraite, siège au Conseil national de sécurité (son nom a été cité dans les années 2000 dans un rapport de l’ONU, qui l’accusait d’être l’un des responsables du « pillage » de la RDC). Sa femme, l’ancienne députée Janet Museveni, est ministre de l’Éducation et des Sports depuis 2016.
Mais c’est surtout l’ascension fulgurante de son fils qui a alimenté la polémique : le lieutenant- général Muhoozi Kainerugaba est le numéro deux de l’armée et, même s’il s’en défend, il est soupçonné de vouloir succéder à son père à la tête de l’État.
Voisinage
Il entretient des relations en dents de scie avec son homologue rwandais Paul Kagame, auprès duquel il a pourtant combattu en Ouganda dans les années 1980. Leurs armées s’affrontent en juin 2000 à Kisangani (RDC). En août 2019, après des mois passés à s’accuser mutuellement de déstabilisation, Yoweri Museveni et Paul Kagame signent un accord visant à apaiser leurs relations.
Répression
Yoweri Museveni tolère peu la contradiction. Régulièrement accusé de vouloir museler ses adversaires, il a fait passer en 2018 une taxe sur les réseaux sociaux jugée liberticide. La campagne présidentielle, marquée par le bras de fer qui l’oppose à Bobi Wine, a été émaillée de violences. Trente-sept personnes, selon le bilan officiel, ont été tuées lors des troubles qui ont secoué le pays à la fin du mois de novembre. « Certains jouent avec le feu et sont soutenus par des puissances étrangères, mais aucune violence ne sera tolérée. Personne ne pourra nous perturber », insiste le président.
Bobi Wine
Bête noire du régime de Museveni, le chanteur devenu opposant est, à 38 ans, une icône de la jeunesse urbaine. Député et candidat à la présidentielle, il constitue une menace inattendue pour le chef de l’État. Il a reçu le soutien de Kizza Besigye, le rival historique de Museveni, qui a annoncé en août dernier qu’il renonçait à se lancer dans la course. Fréquemment arrêté, le principal candidat de l’opposition sait toutefois que ses chances de l’emporter sont très minces.