Principal interlocuteur d’Alassane Ouattara (ADO) dans le cadre des discussions entamées le 11 novembre à l’hôtel du Golfe d’Abidjan, Henri Konan Bédié a durci sa position le 9 décembre, en contestant à nouveau publiquement la légalité du troisième mandat du chef de l’État. Il a proposé la mise en place d’un dialogue national afin de plancher sur l’organisation « d’élections notamment présidentielles, transparentes, crédibles et inclusives ». Un discours perçu comme une « déclaration de guerre » dans l’entourage présidentiel.
En coulisses, le patron du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), soutenu par l’ex-président Laurent Gbagbo – mais aussi par l’ancien patron du Credit suisse, Tidjane Thiam – portait ces dernières semaines déjà de nouvelles revendications bien plus tranchées, tout en maintenant le contact téléphonique avec le chef de l’État, qui le suspecte d’avoir tergiversé pour gagner du temps et maintenir le statu quo.
Menace de boycott
Selon nos informations, le « sphinx de Daoukro » continuait de solliciter une réforme de la Commission électorale indépendante (CEI) conformément à un arrêt de la Cour africaine des droits de l’homme, et un nouveau redécoupage électoral, en vue de l’organisation d’élections législatives inclusives.
Mais en privé, il confiait avoir boycotté la présidentielle du 31 octobre pour ne pas cautionner le troisième mandat du chef de l’État. Il suspectait l’entourage d’Alassane Ouattara de vouloir « lui attribuer 30 % des voix » lors du scrutin. Si aucun accord n’est trouvé avec ADO, il envisage d’ailleurs, avec Laurent Gbagbo, de boycotter les prochaines législatives de 2021.
Pour Henri Konan Bédié, la réconciliation a un « prix » : il conditionnait déjà ces derniers jours la réussite du dialogue en cours à la libération de l’ensemble des prisonniers issus du PDCI et du reste de l’opposition – une revendication qu’il a réaffirmé le 9 décembre. ADO lui avait explicitement répondu ne pouvoir « se substituer à la justice » et « décider à la place de cette dernière de libérer des personnes dont les cas sont en cours d’instruction et avant même qu’elles aient pu être jugées ».
« Surenchère » de l’opposition
De son côté, le chef de l’État exigeait déjà de lui la dissolution officielle du Conseil national de transition (CNT) et le retrait de l’appel à la désobéissance civile. Après avoir longtemps hésité, étant sous la pression de l’opposition, dont il est le porte-parole, HKB a finalement répondu favorablement.
De son côté, Laurent Gbagbo prépare son retour à Abidjan avant la fin de l’année contre l’avis d’Alassane Ouattara, qui souhaite attendre la fin de la procédure d’appel en cours devant la Cour pénale internationale (CPI). L’ancien président est sous le coup d’une condamnation à 20 ans de prison pour « braquage » de la BCEAO lors de la crise post-électorale de 2011. Une sentence qu’il réfute, tout en sachant qu’il lui sera difficile de rentrer dans son pays sans que les autorités n’aient donné leur accord à la CPI.
Alassane Ouattara, qui doit être investi le 14 décembre, estime que ses opposants sont dans la « surenchère » mais demeure persuadé qu’ils reviendront à de meilleurs sentiments.