Politique

Algérie : en l’absence de Tebboune, les dossiers en souffrance s’accumulent

Réforme constitutionnelle, budget du gouvernement, situation sécuritaire… la convalescence du président atteint du Covid-19 ralentit l’activité de l’État.

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Mis à jour le 24 novembre 2020 à 11:41

Le président Abdelmadjid Tebboune lors de la conférence sur le plan de relance à Alger en août 2020. © Billal Bensalem/NurPhoto/AFP

Aggravation de la crise sanitaire, indicateurs économiques au rouge, situation politique bloquée et gel de plusieurs décisions afférentes à la gestion courante du pays… L’absence du président Tebboune qui boucle ce mardi 24 novembre son 27e jour d’hospitalisation en Allemagne a plongé le pays dans une quasi-paralysie.

Bulletins médicaux laconiques et rumeurs orchestrées sur un imminent retour du président au pays rappellent aux Algériens l’épisode de la vacance du pouvoir sous Abdelaziz Bouteflika, durant les années qui ont suivi son AVC (accident vasculaire cérébral). À la différence près que la crise institutionnelle actuelle est compliquée par la pandémie du Covid-19 et ses multiples conséquences.

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Seul sur la scène publique avec des prérogatives très limitées, le Premier ministre Abdelaziz Djerad tente de colmater les brèches : il a ainsi ordonné mercredi 17 novembre, le gel des nominations et des fins de fonction des cadres des différents ministères et des institutions publiques.

Gel des nominations

Toutes les décisions d’attribution de postes de magistrats, responsables des organes de sécurité, de walis, d’ambassadeurs et des envoyés extraordinaires de la République ne peuvent en effet être signées que par le président. La circulation active du virus et l’incertitude sur l’état de santé du chef de l’État ne donne aucune visibilité sur l’avenir proche.

Coincés entre deux Constitutions, les Algériens attendent le retour d’Abdelmadjid Tebboune au pays pour valider la consultation référendaire qui s’est déroulée le 1er novembre avec un taux d’abstention record de près de 77 %. Or, pour entrer en vigueur, la nouvelle loi fondamentale nécessite la signature du chef de l’État avant sa promulgation et sa publication dans le journal officiel.

Coincés entre deux Constitutions, les Algériens attendent le retour du président Tebboune

La longue absence du président algérien, qui préside lui-même le Haut conseil de sécurité, a également une incidence sur la gestion sécuritaire du pays, alors que le Maroc et le Polisario ont repris les hostilités à la mi-novembre et que le Nord-Mali est sous étroite surveillance d’infiltrations jihadistes.

Le crucial projet de loi de Finances 2021, adopté mardi dernier par l’Assemblée nationale, doit également être signé par le chef de l’État avant la fin de l’année. Sans quoi le gouvernement ne pourrait pas engager de dépenses publiques, ni engranger d’impôt.

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Autre chantier clef où le président est attendu : celui des dépenses de fonctionnement qui, si on se réfère au projet de la loi de Finances de 2021, augmenteront de près de 12 % l’année prochaine, dépassant ainsi pour la première fois l’ensemble des recettes de l’État, fiscalité pétrolière comprise. Elles passeront de 4700 milliards de dinars en 2020 à plus de 5300 milliards de dinars en 2021. Le Premier ministre a ordonné le 18 novembre le gel des crédits budgétaires relatifs à un certain nombre de projets.

Situation explosive

Sur le plan social, la situation est explosive et nécessite des mesures urgentes. La crise sanitaire a provoqué une perte de près d’1 milliard d’euros dans les entreprises publiques et entrainé des vagues multiples de compression du personnel.

De nombreux commerces, particulièrement les restaurants, cafés et agences de voyage, risquent de déposer le bilan. Les chiffres du chômage atteignent des sommets vertigineux. Un plan de relance économique spécial Covid-19 est nécessaire, tant les dommages de la pandémie sur l’économie nationale et la société sont désastreux.

Par ailleurs, les décisions relevant de la gestion de la pandémie du coronavirus qui reprend de plus belle après une période de répit sont également en suspens. Le Premier ministre s’est contenté pour le moment de l’aménagement des horaires de couvre-feu, de l’ajournement au 15 décembre de la rentrée universitaire et de l’interdiction de la prière du vendredi dans la Grande mosquée d’Alger. Alors que de nombreux spécialistes plaident en faveur d’un confinement total des wilayas ou le virus circule en force, estimant que c’est la seule solution pour alléger la pression sur les hôpitaux actuellement débordés.