Une petite commerçante se rend au marché. Soudain, son taxi est stoppé par des rebelles. Les ordres des hommes armés fusent, mais le chauffeur de taxi tarde à les exécuter et son véhicule finit criblé de balles. L’une d’elles transperce le ventre de la passagère… qui perd un rein et doit aujourd’hui porter une ceinture abdominale pour se déplacer.
Lourd tribut

L’efficacité du documentaire « Avenir incertain » tient à ses témoignages vivants, dans lesquels on se projette facilement. © DR
Ce témoignage, c’est la victime elle-même qui le livre face à la caméra, et c’est l’un des nombreux récits poignants qui jalonnent le documentaire Avenir incertain. En 26 minutes, le film tourné entre octobre 2019 et janvier 2020 par l’Association pour le développement intégré et la solidarité interactive (Adisi-Cameroun) résume la situation tragique des populations vivant dans la zone anglophone du Cameroun. Il insiste sur le lourd tribut payé par les jeunes de la région et rappelle aux autorités nationales et internationales la nécessité d’un retour rapide à la paix dans cette zone.
Menaces, tueries, kidnappings suivis de demandes de rançons, déportations forcées, maisons brûlées, fractures économiques, déscolarisations contraintes… Les violences prennent de multiples formes. Et, selon les producteurs du documentaire, les jeunes (75 % de la population), sont les principales cibles des séparatistes, qui les forcent à rejoindre leur propre camp – ou les éliminent s’ils refusent d’obtempérer.
Le film « est l’une des nombreuses manières d’exprimer ce que nous traversons dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest afin de rechercher des solutions durables à la crise en cours », déclare Bertrand Abongwa, le narrateur principal du film. Lui-même n’a pas, malgré les pressions, quitté le Nord-Ouest comme beaucoup d’autres jeunes et garde l’espoir d’une pacification prochaine.
À visage découvert
L’efficacité du documentaire tient à ces témoignages vivants, dans lesquels on se projette facilement. Ici, pas de longs monologues d’experts, ni de « personnages », mais de vrais témoins, nombreux, qui parlent souvent à visage découvert et racontent leur propre histoire. La langue n’est pas un obstacle à la compréhension: les intervenants parlent à la fois le français et l’anglais et le court-métrage est disponible dans les deux versions, sous-titrées.
Avenir incertain est visionnable gratuitement sur YouTube mais n’est pas encore répertorié par la plateforme. Pour y accéder, les spectateurs doivent passer par la page Facebook de l’Adisi-Cameroun. Probablement une stratégie pour faire connaître davantage ses pages digitales et gagner en visibilité.
S’il ne compte aujourd’hui que quelques centaines de vues, il est probable que le message puissant que délivre cet « outil de plaidoyer » rencontre un écho auprès de la société civile et des autorités.