C’est un départ très symbolique. Dans un communiqué envoyé le 11 août, Isabel dos Santos indique qu’elle quitte le conseil d’administration de l’opérateur de téléphonie angolais Unitel, pourtant l’un des fleurons de son empire.
Ce retrait est une nouvelle illustration de la perte d’influence de celle qui était surnommée « la Princesse », détentrice via la société Vidatel de 25 % d’Unitel et devenue la première femme africaine milliardaire en 2013.
Symbole de la réussite angolaise sous l’ère dos Santos, la femme d’affaires est en difficultés depuis le départ de son père, José Eduardo dos Santos, de la présidence angolaise en septembre 2017.
Ébranlée en début d’année par les « Luanda Leaks », qui ont pointé les zones d’ombre de son empire, elle est accusée par la présidence angolaise, dirigée par le successeur de dos Santos, João Lourenço, de détournement de fonds publics. Des accusations qu’Isabel dos Santos conteste vivement.
Un « climat de conflit permanent »
« Dans un contexte où l’économie angolaise et le marché des télécommunications font face à des conditions particulièrement difficiles, il me semble contreproductif et irresponsable de laisser perdurer un climat de conflit permanent et de politisation systématique des administrateurs au sein du conseil d’administration de l’entreprise », affirme dans le communiqué la femme d’affaires angolaise, qui n’a pas précisé si une vente de sa participation était envisagée.
Sa déclaration fait référence au conflit de longue date existant entre les quatre actionnaires d’Unitel et qui s’est conclu à la défaveur d’Isabel dos Santos.
Depuis sa création en 1999, l’entreprise était détenue à part égale (25 %) par quatre entités : le Brésilien Oi (à travers sa filiale PT Ventures), Isabel dos Santos (via Vidatel), un proche de l’ancien président angolais José Eduardo dos Santos, le général Leopoldino do Nascimento (à travers Geni), et la société nationale pétrolière Sonangol (via Mercury).
Or, à partir de 2014, un conflit est apparu entre l’actionnaire brésilien et les autres parties prenantes angolaises, le premier accusant les secondes, et notamment Isabel dos Santos, de mauvaise gestion et de non versement des dividendes dus. Après une longue bataille juridique, un arbitrage a été rendu en 2019 donnant raison au Brésilien Oi. Ce différend avait entraîné un blocage au sein du conseil d’administration d’Unitel et conduit Isabel dos Santos à abandonner le poste de présidente du conseil d’administration qu’elle occupait depuis plusieurs années.
Avoirs gelés
Après ce premier revers, la femme d’affaires a en vécu un second en début d’année : Sonangol a racheté la participation du Brésilien Oi, devenant actionnaire majoritaire d’Unitel avec 50 % de participation contre 25 % pour chacun des deux autres actionnaires restant, Isabel dos Santos et le général Leopoldino do Nascimento.
Le retrait de l’ancienne patronne d’Unitel, leader du secteur télécom angolais avec près de 80 % de parts de marché, intervient dans ce contexte de perte de contrôle face à Sonangol et à l’administration Lourenço.
Défendant son bilan, Isabel dos Santos met en avant dans son communiqué le succès d’un opérateur de téléphonie constituant l’un des plus importants contributeurs fiscaux du pays, ayant investi quelque cinq milliards de dollars dans le réseau mobile et employant plus de 3 000 personnes. Une réussite entachée, cependant, par les accusations récurrentes de népotisme au moment de son entrée au capital d’Unitel.
Ce repli de la femme d’affaires en Angola, où elle n’est pas retournée depuis l’été 2018, intervient après sa sortie du capital de plusieurs sociétés au Portugal, dont l’énergéticien Efacec et la banque Eurobic. Sous le coup d’enquêtes multiples, Isabel dos Santos a vu ses avoirs gelés préventivement en Angola fin 2019 puis au Portugal début 2020.