Coups d’État en Afrique : la fin d’une époque ?

Près de trois ans après le dernier coup de force réussi, en Égypte, l’Afrique va-t-elle (enfin) tourner la page ? Le continent aux 87 putschs a vu défiler un nombre édifiant de « sauveurs suprêmes » en quête de reconversion.

Le Caire, 19 juillet 2013, quelques jours après la destitution de Mohamed Morsi. © Marwan Naamani/AFP

Le Caire, 19 juillet 2013, quelques jours après la destitution de Mohamed Morsi. © Marwan Naamani/AFP

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Publié le 17 mai 2016 Lecture : 2 minutes.

Le Caire, 19 juillet 2013, quelques jours après la destitution de Mohamed Morsi. © Marwan Naamani/AFP
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Coups d’État en Afrique : la fin d’une époque ?

Près de trois ans après le dernier coup de force réussi, en Égypte, l’Afrique va-t-elle (enfin) tourner la page ? Le continent aux 87 putschs a vu défiler un nombre édifiant de « sauveurs suprêmes » en quête de reconversion.

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«Trop de coups d’État en Afrique, ça suffit comme ça », chantait à la fin des années 1980 un Alpha Blondy en battle-dress et casquette de parachutiste. Un quart de siècle plus tard, la mode des putschs militaires est-elle enfin passée sur le continent ? C’est en Égypte qu’ont eu lieu le tout premier et le dernier en date des coups d’État réussis de l’époque contemporaine, celui de Nasser en 1952 et celui d’Abdel Fattah al-Sissi en 2013.

Au pays des pharaons, il est vrai, c’est l’armée qui a son État, et non l’inverse. Reste que, depuis trois ans – durée quasi inédite -, toutes les tentatives de prise du pouvoir par la force en Afrique ont échoué, sombrant parfois dans la caricature, à l’instar du lamentable pronunciamiento tenté en septembre 2015 par le général Diendéré, que les Burkinabè ont qualifié de « coup d’État le plus bête du monde ».

Intégration des valeurs républicaines et des mécanismes républicains par les armées

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Simple accalmie ou tendance lourde ? Tout démontre que le continent le plus touché par la fièvre des complots est en voie de guérison. Un militaire qui, aujourd’hui, voudrait renverser par les armes un gouvernement, fût-il impopulaire, sait qu’il sera immédiatement condamné et banni par l’Union africaine, l’ONU et la communauté internationale, et qu’en cas de dérapage, la Cour pénale internationale l’attend.

Il y a quarante-quatre ans, un Mathieu Kérékou alors simple commandant putschiste pouvait se contenter de répéter au micro des reporters : « Relisez notre déclaration, ce que nous avons dit est vrai. Terminé. »

Désormais, la plupart des cadres des armées africaines se sont approprié les valeurs républicaines et ont intégré les mécanismes démocratiques, à mesure que progressait le niveau de leur formation. Ils ont compris, aussi, que ce qui dans le fond a toujours motivé les coups d’État perpétrés par leurs aînés – à savoir la perception d’une menace contre leurs propres intérêts corporatistes – trouvait sa réponse dans les institutions, la négociation et la légalité.

Place au pouvoir par les urnes et la négociation

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Des putschs, l’Afrique en a connu de tout acabit, jusqu’à la lie. Compradores, vertueux, d’opérette, patriotiques, populaires, ethniques, et même « prodémocratiques », comme celui d’Amadou Toumani Touré dans le Mali de 1991.

Il est arrivé que les peuples applaudissent, sans bien se rendre compte qu’ils signaient là le constat de leur propre impuissance à prendre en main leur destin collectif. Ce n’est plus le cas aujourd’hui : les sauveurs suprêmes en képi et béret font de moins en moins recette, et même si d’ultimes soubresauts prétoriens ne sont évidemment pas à exclure dans l’avenir, c’est au fond des urnes que, de plus en plus, se trouve désormais le pouvoir, pas au bout des fusils.

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