Kenya: un an après, l’horreur de l’attaque du Westgate toujours présente

Maurice Adembesa Ombisa, employé de sécurité, fut l’une des premières victimes du commando islamiste parti à l’assaut du centre commercial Westgate de Nairobi le 21 septembre 2013. Un an après, pour sa veuve, le traumatisme est intact.

Kenya: un an après, l’horreur de l’attaque du Westgate toujours présente © AFP

Kenya: un an après, l’horreur de l’attaque du Westgate toujours présente © AFP

Publié le 17 septembre 2014 Lecture : 3 minutes.

« Nos vies ont changé à jamais », témoigne Eunice Khavetsa.

Vers midi ce samedi-là, le Westgate, centre commercial fréquenté par la classe moyenne et les nombreux expatriés vivant dans la capitale kényane, était bondé quand quatre hommes armés liés au groupe islamiste somalien shebab ont fait irruption, lançant des grenades et vidant de sang-froid les chargeurs de leurs fusils d’assaut Kalachnikov.

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Hommes, femmes et enfants sont indifféremment abattus. Les shebab, alliés à la nébuleuse extrémiste Al-Qaïda, revendiquèrent immédiatement l’attaque, affirmant agir en représailles à l’intervention militaire kényane les visant dans le sud de la Somalie voisine.

Le siège va durer quatre jours, et faire officiellement 67 morts.

Maurice Adembesa Ombisa contrôlait les voitures à l’entrée d’un des parkings.

Depuis sa mort, « la vie est extrêmement difficile », confie sa veuve, qui, à 27 ans, vit seule avec son petit garçon de neuf ans et sa petite fille de sept ans à charge, dans une minuscule maison de tôle d’un bidonville de Nairobi. « Les enfants viennent vers moi pour tout — les frais de scolarité, la nourriture, les habits — et je peux à peine payer le loyer de la maison ».

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Elle n’a reçu aucune compensation de l’entreprise de son mari, car il venait tout juste d’être employé. Rien non plus du gouvernement. Elle a seulement perçu un peu d’argent de la Croix-Rouge kényane, qui avait fait une collecte pour aider les victimes et leurs familles.

– « Champ de bataille » –

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Pour Miriam Okola aussi, parler de son mari est douloureux. Chauffeur, il était allé faire des courses au Westgate pour ses employeurs. Lui aussi est mort.

« Mes enfants ne cessent de me poser des questions sur leur père — à tel point que j’ai dû ranger ses photos », dit la jeune femme de 29 ans, les larmes aux yeux.

Pour ceux qui ont réchappé à l’attaque, ses conséquences restent également douloureuses.

C’est le cas de Leah Njuki, qui travaillait comme vendeuse au Westgate et est depuis au chômage le centre commercial, dont une partie s’est effondrée dans l’assaut, n’a jamais rouvert. « J’ai perdu mon travail et je n’ai pas eu la chance d’en trouver un autre », dit cette mère de famille.

Rama Manikumar, qui prenait un verre dans le centre commercial quand les tirs ont débuté, raconte dans un film dévoilé pour les commémorations avoir « vu la panique des gens, qui couraient, criaient partout ».

« C’était comme un champ de bataille, l’endroit était rempli de fumée, il n’y avait plus de lumière (. . . ) mais en revanche du verre brisé et des munitions sur le sol », poursuit-elle.

« Ce que ces gens ont fait au Westgate, c’est l’exact opposé de ce que nous enseigne l’Islam », dit, aussi dans ce film, Abdul Haji. Au début de l’attaque, il s’est précipité dans le bâtiment pour tenter de sauver des vies. J’ai vu des enfants se faire tirer dessus, j’ai vu des jeunes filles tuées, j’ai vu des personnes âgées tuées ».

Dans le film, certains préfèrent mettre l’accent sur les très rares moments positifs.

Ranju Shah, qui prenait un café, se rappelle ainsi comment elle s’est cachée pendant deux heures dans le centre commercial avec d’autres Kényans alors que les tirs fusaient. Et comment tous se réconfortaient.

« Ce qui s’est passé a rassemblé les Kényans », affirme-t-elle. « Tout le monde essayait d’aider tout le monde, personne ne faisait attention à la classe sociale, à la religion des autres, tout le monde s’aidait ».

D’autres rescapés refusent de se laisser abattre.

Les shebab constituent toujours une menace, même s’ils ont subi une série ininterrompue de revers militaires en Somalie et si leur chef a été tué dans une frappe américaine début septembre.

Mais Ben Mulwa, blessé par balle à la jambe lors de l’attaque, met un point d’honneur à continuer de fréquenter les centres commerciaux.

« Cet acte lâche ne m’intimide pas », assure cet homme de 32 ans, devant le bâtiment du Westgate toujours criblé de balles et aujourd’hui condamné.

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