Gabon: guerre ouverte entre le président Bongo et Jean Ping

A deux ans de la présidentielle gabonaise, la guerre est déjà déclarée entre le président Ali Bongo Ondimba et le cacique de l’ancien régime passé dans l’opposition Jean Ping, qui se voit déjà comme son principal challenger.

Gabon: guerre ouverte entre le président Bongo et Jean Ping © AFP

Gabon: guerre ouverte entre le président Bongo et Jean Ping © AFP

Publié le 22 août 2014 Lecture : 3 minutes.

« S’unir et se débarrasser d’Ali! »: tel est l’objectif ouvertement affiché par Jean Ping, ancien bras droit du défunt Omar Bongo Ondimba, devenu en l’espace de quelques mois l’opposant le plus virulent au régime.

Diplomate très connu sur la scène internationale, cet ancien président de l’Organisation de pays exportateurs de pétrole (OPEP) et ex-dirigeant de l’Union africaine ne laisse plus passer une semaine sans faire de nouvelles déclarations fracassantes contre Ali Bongo.

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Le Gabon est gouverné par « un autocrate », accuse-t-il ainsi de nouveau dans un entretien accordé à l’AFP.

« Avec 1,5 million d’habitants et toutes les ressources que nous avons, comment ne peut-on pas subvenir aux besoins élémentaires de la population? Comment se fait-il que les gens fouillent dans les poubelles pour manger, et ne vont pas à l’école? », lance-t-il.

– Ping « sans emploi » –

Las, le chef de l’Etat, qui avait ignoré jusque-là les provocations de Jean Ping, a fini par contre-attaquer.

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« Je n?ai pas de problème avec M. Jean Ping, même si lui il a un problème avec moi. Je constate simplement qu?il s?est joint à la cohorte d?un certain nombre de leaders politiques qui n’ont, vis-à-vis de ma personne et du parti que je représente, que de la haine », a déclaré Ali Bongo à la presse en marge de la fête de l’Indépendance, le 17 août.

« Il n’y a pas de projet politique », a poursuivi le chef de l’Etat.

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Ali Bongo a ensuite enchaîné les piques à l’intention de son ancien allié politique, affirmant notamment avoir suggéré le nom de Ping à son père en 1984, lorsque celui-ci cherchait un nouveau directeur de cabinet.

Car M. Ping a longtemps fait partie du premier cercle des proches d’Omar Bongo Ondimba durant ses 41 ans de règne sans partage sur le Gabon.

Outre une carrière politique de premier plan – comme ministre du pétrole, puis des Affaires étrangères et directeur de cabinet du président – il fut aussi le compagnon de Pascaline Bongo, fille d’Omar et soeur aînée d’Ali, puissante argentière de la famille dont il est aujourd’hui séparé.

« Jean Ping se trouvant sans emploi, n?a rien trouvé de mieux que de vouloir mon emploi, c?est la blague qui circule dans le milieu des chefs d?État » africains, a plaisanté Ali Bongo.

– Ping candidat en 2016? –

« C’est lui (Ali Bongo) qui semble me prendre comme son principal challenger. C’est mon meilleur directeur de campagne », répond l’intéressé, qui n’a pas encore annoncé publiquement sa candidature.

Fin juillet, Jean Ping a rassemblé une quinzaine de leaders politiques pour créer ensemble le « Front de l’opposition pour l’alternance démocratique » (Fopa).

Parmi ses nouveaux alliés de l’opposition, beaucoup d’anciens caciques du régime d’Omar Bongo ayant tourné casaque lors de la présidentielle de 2009 qui a vu Ali succéder à son père.

Pour cette opposition, éclatée et minée par les divisions, et dont beaucoup de dirigeants sont aujourd’hui âgés, Ping, avec son statut international et son carnet d’adresses bien rempli, apparait comme le principal espoir de battre Ali Bongo en 2016. A 71 ans, ce métis gabonais-chinois appartient à l’ethnie minoritaire myene.

« Ils se cherchent un nouveau leader charismatique maintenant qu’André Mba Obame n’est plus là », confirme le politologue Wilson-André Ndombet. M. Mba Obame, lui aussi ancien protégé d’Omar Bongo, s’était présenté à l’élection de 2009, qu’il affirmait avoir gagnée, avant de disparaitre de l’arène politique il y a deux ans à cause de graves problèmes de santé.

Pour rallier l’opinion, Jean Ping joue aujourd’hui la carte sensible – et démagogique selon certains – de la lutte contre le trop grand nombre supposé d’étrangers dans le pays. Il accuse ainsi le président Bongo d’être entouré d’une « légion étrangère », allusion directe à son influent directeur de cabinet d’origine béninoise, Maixent Accrombessi.

« C’est lui qui dirige véritablement le Gabon », assène Ping, en se défendant de toute « xénophobie ». D’après lui, « nous ne pouvons pas être gouvernés par des gens mafieux et apatrides, qui pillent l’argent de l’Etat et l’investissent ailleurs ».

Le président Ali Bongo dénonce en retour une rhétorique digne du Front National, le parti d’extrême droite français. Ceux qui tiennent de tels discours « devront en porter la responsabilité », met-il-en garde, se posant en garant « de la paix, de l’unité nationale et du vivre-ensemble ».

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