Soudan: les chrétiens cibles d’un « harcèlement croissant »

Des propriétés détruites ou saisies, une jeune femme condamnée à mort pour apostasie: selon le chef du Conseil des églises soudanaises, la minorité chrétienne du pays fait face à un harcèlement croissant de la part des autorités islamistes.

Soudan: les chrétiens cibles d’un « harcèlement croissant » © AFP

Soudan: les chrétiens cibles d’un « harcèlement croissant » © AFP

Publié le 27 juillet 2014 Lecture : 3 minutes.

Kori Elramla Kori Kuku, secrétaire général du Conseil des églises soudanaises, estime que sa communauté a été fragilisée par l’indépendance du Soudan du Sud en 2011 et le départ des chrétiens vers ce nouveau pays où le chrétiens et animistes sont majoritaires.

La condamnation à mort pour apostasie prononcée en mai contre une Soudanaise chrétienne, Meriam Yahia Ibrahim Ishag, a mis en lumière les entraves à la liberté religieuse dans le pays tenu depuis 25 ans par un régime islamiste.

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La jeune mère de famille, qui avait trouvé refuge à l’ambassade américaine après l’annulation de sa peine par une cour d’appel, a été accueillie jeudi en Italie.

En trois ans, « les choses ont complètement changé, nous sommes privés de la liberté dont nous jouissions », a assuré M. Kuku dans un entretien cette semaine à l’AFP.

L’instance qu’il dirige inclut plus d’une dizaines de confessions, dont des catholiques et des coptes, et pour tous la situation est « très mauvaise », explique-t-il.

Il cite ainsi un article de presse affirmant que le ministère des Affaires religieuses n’autoriserait plus la construction de nouvelles églises compte tenu du départ de la plupart des chrétiens vers le sud.

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Un haut responsable du parti au pouvoir, Rabbie Abdelatti Ebaid, a cependant assuré ne pas avoir eu connaissance d’une telle décision.

Dans les faits, M. Kuku assure que les églises sont déjà dans le viseur des autorités.

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Selon lui, une église du nord de la capitale a été détruite par des bulldozers au motif qu’elle ne disposait pas de titres de propriété. Et un bâtiment hébergeant une autre église dans le centre de Khartoum a été saisi par les autorités.

Des agents de la sécurité ont aussi interrompu, selon lui, un groupe de discussions réunissant des chrétiens et musulmans venus du Darfour, du Nil-Bleu et du Kordofan-Sud — des régions en proie aux violences.

– Offices sous surveillance –

Selon M. Kuku, les agents sont intervenus peu après le début de l’atelier marqué par des lectures de passages de la Bible et du Coran. « Personne n’a été forcé » à lire où à écouter, s’exclame-t-il, « je ne vois pas ce qu’il y a de mal à lire la Bible ».

Selon Christian Solidarity Worldwide, une ONG basée en Grande-Bretagne qui défend la liberté religieuse, les expulsions, confiscations, destructions de propriétés de l’Eglise et autres actes anti-chrétiens ont augmenté depuis décembre 2012.

« Nous avons le sentiment que nos droits ne sont pas respectés », même si la Constitution garantit la liberté de culte, explique M. Kuku au siège du Conseil des églises, un petit bâtiment qui ne se distingue que pas une petite croix dans la ferronnerie au-dessus de la porte.

Le chef du Conseil reconnaît que les cérémonies religieuses continuent de se dérouler sans entraves, mais en présence d’agents de sécurité chargés de surveiller les offices.

Bien qu’il n’y ait pas de données précises sur le nombre de chrétiens restés au Soudan, M. Ebaid, membre du parti du Congrès national du président Omar el-Béchir, assure que ces derniers ont « un poids économique, un poids intellectuel » et que « leurs opinions sont respectées ».

Ils ne sont « pas à la marge » de la société, insiste ce haut responsable.

M. Béchir a de son côté récemment assuré que son pays était un « modèle de stimulation de la tolérance religieuse », selon les médias officiels.

« Je suis conscient que nous sommes une minorité. Mais nous avons le droit en tant que citoyens soudanais de pratiquer notre foi, de construire des églises et d’exercer notre liberté religieuse », revendique M. Kuku.

« Nous n’entravons pas leurs prières à Dieu. Pourquoi entraveraient-ils les nôtres », remarque-t-il.

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