« Ne votez pas comme des moutons! », dit Tutu aux Sud-Africains

« Ne votez pas comme des moutons! », a lancé mercredi aux Sud-Africains l’archevêque Desmond Tutu, à deux semaines des élections du 7 mai, répétant qu’il ne voterait plus pour le Congrès national africain (ANC) de son ami Nelson Mandela, dont vingt ans de pouvoir l’ont déçu.

« Ne votez pas comme des moutons! », dit Tutu aux Sud-Africains © AFP

« Ne votez pas comme des moutons! », dit Tutu aux Sud-Africains © AFP

Publié le 23 avril 2014 Lecture : 2 minutes.

« Nous avons une chose précieuse, le droit de vote. Réfléchissez à ce que vous voulez en faire. Utilisez votre droit de vote. Réfléchissez, réfléchissez, réfléchissez! » a martelé le prix Nobel de la paix, désormais âgé de 82 ans, en se frappant le front de l’index, au cours d’une conférence de presse à la cathédrale anglicane du Cap.

Toujours une conscience morale du pays même s’il est officiellement à la retraite, le prélat a répété mercredi ce qu’il avait déclaré avec fracas l’an dernier: il ne votera plus pour l’ANC, le parti au pouvoir depuis vingt ans en Afrique du Sud.

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« Je ne vais pas voter pour eux. Je le dis le coeur lourd. (. . . ) Je vais voter, mais je ne vais pas vous dire pour qui je vais voter », a-t-il dit.

S’il a évité de trop s’appesantir sur l’ANC, Mgr Tutu a lâché quelques piques cinglantes.

« Nous rêvions d’une société où les gens sentent que leur opinion compte, une société compassionnelle. Ca ne peut être une société où les enfants vont se coucher le ventre creux », a-t-il lancé, alors que le quart des Sud-Africains ne mangent pas à leur faim.

« Personne ne devrait aller se coucher le ventre creux, c’est une honte. Nous ne devrions pas lire d’histoire d’enfants qui tombent dans un trou d’aisance, c’est une honte », a-t-il poursuivi, rappelant qu’un jeune garçon était mort après être tombé dans les latrines sommaires de son école en janvier.

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– La liberté ne va pas de soi –

Prenant son ami Nelson Mandela –déjà affaibli à l’époque– à témoin, Desmond Tutu avait déclaré à propos de l’état de nombreuses écoles du pays en 2012: « S’il savait ce qui se passe, il en pleurerait. C’est totalement inacceptable! » Les choses n’ont que peu évolué depuis.

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Evoquant Mandela et les grands noms de la lutte contre le régime ségrégationniste de l’apartheid, il a égratigné les dirigeants actuels de l’ANC, chez qui « il y a des gens bien, il y a des gens médiocres », selon lui.

« Nous devons admettre qu’ils ne sont pas très nombreux, les successeurs de ces leaders (historiques du mouvement) qui leur arrivent à la cheville. Mais leurs chevilles étaient hautes! »

« Je n’ai jamais appartenu à aucun parti. J’ai pensé soutenir un parti aussi proche que possible des choses que j’aimerais voir », a noté l’ecclésiastique anglican.

« Nous avons fait des choses remarquables » depuis 1994, a-t-il cependant relevé.

« Quand vous vous rappelez d’où nous venons! On nous disait que les enfants de races différentes ne pouvaient pas aller dans la même école », a-t-il rappelé, se réjouissant de voir maintenant des gamins de toutes les couleurs de peau partager les mêmes bancs.

Et Desmond Tutu de souligner qu’il fallait se réjouir, alors que la démocratie multiraciale sud-africaine fête ses vingt ans dimanche. « C’est toujours quelque chose que nous voulons célébrer avec joie », a-t-il dit, rappelant que le pays jouit d’ »une des meilleures Constitutions du monde ».

« Le fait que nous fêtons vingt ans de liberté, c’est une sacrée réussite. C’est quelque chose dont nous devons tous être fiers, nous les Sud-Africains », a relevé Mgr Tutu.

« La liberté n’est pas quelque chose qui va de soi », a-t-il cependant prévenu. « Regardez ce qui se passe en Russie, en Ukraine, en Syrie. . . « 

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