Un « Mister Gay » aide la Namibie homosexuelle à sortir du placard

Lorsque Wendelinus Hamutenya a dit à son père qu’il était gay, il a été envoyé illico voir un psychiatre. Sept ans plus tard, il est devenu l’homosexuel le plus connu de son pays après avoir remporté le premier concours de beauté Mister Gay Namibie.

Un « Mister Gay » aide la Namibie homosexuelle à sortir du placard © AFP

Un « Mister Gay » aide la Namibie homosexuelle à sortir du placard © AFP

Publié le 7 février 2012 Lecture : 3 minutes.

Sa victoire fera de Wendelinus, 25 ans, le premier Africain noir à concourir pour le titre mondial de Mister Gay World, en avril à Johannesburg.

« Gagner le titre de Mister Gay en Namibie a permis d’ouvrir le débat sur les gays (. . . ). J’ai reçu des félicitations venues de partout, aussi de personnes hétérosexuelles. Ca a été une percée! », explique le timide jeune homme à l’AFP.

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Cette percée a cependant été suivie d’un retour de bâton. Car deux semaines après avoir remporté le titre –fin novembre–, Wendelinus a été agressé et battu par deux hommes qui ont exigé une partie de son prix.

Des voisins sont venus à son secours, mais les assaillants ont disparu dans la nature. Quant à Wendelinus, il a fini à l’hôpital avec des contusions aux côtes et des coupures au nez et au front.

« J’ai porté plainte au poste de police le plus proche. J’y suis retourné il y a quelques jours pour voir si des progrès avaient été faits. Les policiers m’ont répondu que le dossier s’était perdu », soupire-t-il.

Pourtant, il estime que sa victoire à Mister Gay Namibie et son agression –qui a déclenché un tollé parmi les groupes gay et plus largement sur les réseaux sociaux– a montré que son pays avait bien évolué.

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Selon la Constitution namibienne, « personne ne peut être victime de discrimination en raison du sexe, de la race, de la couleur, de l’origine ethnique, de la religion, de la croyance ou du statut social ou économique ».

Mais une loi de 1927 punit toujours la sodomie. Si elle n’est plus appliquée, les plus hauts dirigeants namibiens ne se sont pas privés de conspuer les homosexuels dans les années qui ont suivi l’indépendance de ce pays de 2,1 millions d’habitants, arrachée en 1990 à l’Afrique du Sud de l’apartheid.

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« Les homosexuels doivent être condamnés et rejetés dans notre société », a notamment déclaré en 1996 le président de l’époque, Sam Nujoma.

« La police a l’ordre de vous arrêter, vous déporter et vous emprisonner », leur a-t-il lancé cinq ans plus tard.

En 2000, le ministre Jerry Ekandjo a soutenu que la police devait « éliminer » les homosexuels « de la face de la Namibie », et même tuer leurs chiens.

service psychiatrique

C’est dans ce contexte que le père de Wendelinus Hamutenya l’a fait hospitaliser quand il a appris son homosexualité.

« A 16 ans, j’ai remarqué mon attirance pour les garçons et les hommes. Et à 18 ans, alors que j’étais encore à l’école, je l’ai dit à mon père, qui a rapidement téléphoné à la police pour qu’elle m’emmène au service psychiatrique de l’hôpital central de Windhoek », raconte le jeune homme.

« Ca a été déchirant de passer par tout ça! »

Après quelques jours, il s’est enfui de l’hôpital et s’est réfugié chez des amis.

Il s’est finalement réconcilié avec sa famille, qui l’accepte maintenant tel qu’il est.

Pour Noël, il est retourné auréolé de son titre au village où il gardait le bétail quand il était enfant. Il y a reçu un accueil triomphal.

Mais son expérience demeure une exception, selon Linda Baumann, directrice du groupe de défense des droits des homosexuels Outright Namibia, qui rappelle que de nombreux homos doivent encore se marier avec une femme pour se plier aux conventions, tandis que les lesbiennes sont régulièrement victimes de viols de la part d’hommes qui cherchent à les « guérir ».

« Si les lesbiennes veulent porter plainte à la police, on leur dit +vous l’avez voulu+, et les dossiers disparaissent », accuse Mme Baumann.

Très actif sur l’internet, Wendelinus Hamutenya espère que son expérience aidera les homosexuels namibiens à sortir du placard.

« Depuis que je suis Mister Gay Namibie, je reçois beaucoup d’appels de jeunes garçons et de jeunes hommes qui se rendent compte qu’ils sont gay ou bisexuels, mais ils sont confus, troublés, et ont peur de faire leur +coming-out+ », relève-t-il.

« Je voudrais donc visiter toute la Namibie pour parler aux gens d’acceptation et de tolérance. « 

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