États-Unis : Africa is beautiful !

Longtemps délaissé, le continent éveille peu à peu l’intérêt de la Maison Blanche. Pour des raisons avant tout commerciales et sécuritaires.

Le président Barack Obama à Dakar, le 27 juin. © AFP Photo/Saul Loeb

Le président Barack Obama à Dakar, le 27 juin. © AFP Photo/Saul Loeb

Publié le 7 octobre 2013 Lecture : 4 minutes.

États-Unis : Africa is beautiful
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États-Unis : Africa is beautiful

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Barack Obama accueillera un sommet des chefs d’État africains en 2014. On n’en connaît encore ni la date, ni le lieu, ni la liste des participants. Mais c’est, en tout cas, une première dans l’histoire des relations de la grande Amérique avec l’Afrique. Si le continent ne figure toujours pas parmi les priorités de la politique étrangère des États-Unis – Obama y porte une attention limitée -, la Maison Blanche ne s’en désintéresse pas pour autant, surtout depuis que cette région du monde affiche une croissance pérenne. Après tout, la France, le Japon, la Chine, l’Inde, la Turquie, l’Europe et l’Amérique du Sud ont déjà, eux, leurs sommets avec le continent.

Les Américains commencèrent à s’y intéresser lors de la décolonisation. En 1959, une sous-commission sur l’Afrique était créée au sein de chacune des deux commissions des Affaires étrangères du Congrès. Un an plus tard, la CIA se dotait d’une division spécialisée et les premières ambassades furent ouvertes. Les États-Unis jouèrent un rôle non négligeable dans les conflits qui déchirèrent le continent pendant la guerre froide. Il fallait absolument éviter que certains pays basculent dans le giron soviétique. À la suite des attaques du 11 septembre 2001, Washington a accru sa coopération militaire pour des raisons sécuritaires… et économiques. Les majors pétrolières texanes ont notamment pris pied dans le golfe de Guinée, ce qui leur a permis d’être moins dépendantes du Moyen-Orient.

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Une visite hollywoodienne en Afrique

Lors de son premier mandat, Obama ne s’est déplacé que deux fois sur le continent : en Égypte, au Caire, en juin 2009, et au Ghana, à Accra, un mois plus tard. Une déception pour les Africains, qui attendaient mieux d’un président aux origines kényanes. Il a corrigé le tir en effectuant, du 26 juin au 3 juillet 2013, sa première tournée dans des pays – Sénégal, Afrique du Sud et Tanzanie – où les dirigeants ont été démocratiquement élus. Les storytellers avaient concocté un scénario très hollywoodien, organisant des visites à la Maison des esclaves de l’île de Gorée, au Sénégal, haut lieu de la déportation vers l’Amérique, puis à Robben Island, le bagne où fut incarcéré Nelson Mandela.

Sur le fond, pas de révolution. Les piliers de la politique africaine des États-Unis restent le soutien à la sécurité régionale, la démocratie, la bonne gouvernance, la réforme de la justice, la lutte contre la corruption, la promotion des droits de l’homme, l’émergence de la société civile, le renforcement des libertés individuelles. "Nos actions ont permis d’améliorer les conditions de vie sur le continent, en matière de santé, de réforme des systèmes de sécurité et d’émancipation des femmes", a soutenu, devant le Sénat en juillet, Linda Thomas-Greenfield, la secrétaire d’État adjointe pour les affaires africaines, avant d’évoquer les success-stories des pays anglophones comme la Tanzanie, le Ghana, le Lesotho…

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Lors de son périple africain, Obama a proposé deux nouvelles initiatives. La première, "Power Africa", vise à apporter l’électricité à 20 millions de foyers en offrant un appui technique et en aidant les gouvernements à mobiliser des investissements du secteur privé. Ce plan, dont l’enveloppe prévue est de 7 milliards de dollars (environ 5 milliards d’euros), devrait bénéficier à l’Éthiopie, au Ghana, au Kenya, au Liberia, au Nigeria et à la Tanzanie. Le second programme, "Trade Africa", concerne les pays de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC). Il porte sur l’intégration régionale des procédures douanières destinées à stimuler le commerce. Il se fixe pour but d’accroître de 40 % les échanges avec cette région dynamique.

Une organisation fragmentée

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Les questions sécuritaires restent une priorité, avec 250 millions de dollars (sans compter l’Afrique du Nord) consacrés chaque année à la coopération militaire. Le Partenariat transsaharien contre le terrorisme (TSCTP), créé en 2005 et doté d’un budget de 8 millions de dollars, a pour objectif d’aider tous les pays de la bande sahélo-saharienne à lutter contre les organisations terroristes. Le volet militaire du TSCTP est placé sous le Commandement des forces américaines en Afrique (Africom), basé à Stuttgart, en Allemagne. Washington organise régulièrement des exercices réunissant les forces américaines, africaines et de pays de l’Otan comme la France et l’Espagne, et garde une forte présence à Djibouti afin de renforcer la lutte contre les Shebab et la piraterie. Les forces spéciales sont positionnées dans le Sahel, où elles traquent Joseph Kony, le chef de l’Armée de résistance du seigneur (LRA).

Les États-Unis envoient aussi des Peace Corps (plus de 8 000 hommes par an, dont 45 % en Afrique). Des volontaires qui servent aussi de relais d’information, permettant de prendre le pouls des populations et des tensions ethnico-politico-sociales. Enfin, la Maison Blanche attribue de nombreuses bourses aux hommes politiques, officiers, journalistes et leaders d’opinion. Objectif : promouvoir une génération de dirigeants convertis aux idéaux américains. À Washington, une impressionnante machine suit tous les dossiers africains. Toutefois, cette organisation reste très fragmentée, et les querelles internes sont fréquentes. En fait, peu de dossiers franchissent le cap de l’administration pour arriver sur le bureau du secrétaire d’État et, a fortiori, du président.

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