RDC : le grand rendez-vous manqué de la décentralisation

Quatre ans après l’adoption de la loi, le redécoupage territorial n’est toujours pas entré en vigueur en RDC. Et les débats redeviennent houleux.

Joseph Kabila a-t-il la volonté politique de mener à bien le chantier de la décentralisation ? © Gwenn Dubourthoumieu/AFP

Joseph Kabila a-t-il la volonté politique de mener à bien le chantier de la décentralisation ? © Gwenn Dubourthoumieu/AFP

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Publié le 17 octobre 2012 Lecture : 2 minutes.

RDC : Mbote changement ?
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RDC : Mbote changement ?

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Trente-six mois pour passer de onze à vingt-six provinces. Plus de cinq ans après, un seul constat : le tour de magie promis par le constituant congolais n’a pas fonctionné. La loi sur la décentralisation a été promulguée en 2008, mais les nouvelles entités territoriales n’ont jamais vu le jour. Absence de volonté politique ou viabilité douteuse de certaines des futures provinces ? La question divise.

Aux détracteurs et défenseurs du projet s’ajoutent désormais les adeptes d’un découpage « au cas par cas ». Parmi eux, Philippe Muanda-Vuidi, le rapporteur de l’assemblée provinciale du Bas-Congo. L’élu du territoire de Lukula considère que le pays n’avait pas bien mesuré l’ampleur de la tâche. « Avant d’installer les nouvelles provinces, il faut disposer des infrastructures nécessaires. Or dans certains coins de la RDC, il n’existe pas de bâtiments adéquats pour abriter les institutions administratives locales », explique-t-il. Le député de l’Union pour la reconstruction du Congo (Urec) préconise donc d’« établir des critères pouvant permettre d’évaluer en amont la viabilité d’une nouvelle province à créer ».

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Mascarade

Début 2011, le gouver­nement congolais s’était lui aussi rendu compte que le processus était mal engagé. « Je siégeais au Parlement de transition lorsqu’a été élaborée la Constitution qui a prévu le découpage territorial. Je le dis et le confirme, nous n’avons pas fait d’étude de faisabilité sur les plans financier, fiscal, technique et logistique de ce découpage », avait reconnu Louis Koyagialo, alors ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation. Lors de la révision constitutionnelle du 20 janvier 2011, la majorité au pouvoir décide de rectifier le tir : elle maintient le découpage du territoire en vingt-six provinces, mais prévoit qu’une « loi de programmation déterminera [leurs] modalités d’installation », l’échéance constitutionnelle étant largement dépassée.

Pour le professeur Tshiyembe Mwayila, qui s’intéresse notamment à la problématique de la décentralisation en Afrique subsaharienne, le retard pris dans la mise en place de nouvelles provinces en RDC ne peut se justifier que par « l’absence de volonté politique ». Le directeur de l’Institut panafricain de Nancy s’insurge contre « toute idée déguisée » de renvoyer ce découpage aux calendes grecques. « C’est une grande mascarade, s’écrie-t-il. Il ne s’agit pas d’un problème de moyens financiers ou autre question de ce type, car toutes les villes du monde se sont construites sur du néant. Lancer ce découpage inciterait les nouvelles provinces à produire des richesses pour le plus grand bien de la RDC », soutient le chercheur. Et d’ajouter : « Le pays aura alors une idée claire des provinces qui peinent à décoller, avant d’apporter des correctifs au mécanisme mis en place. »

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Dans l’Ituri, au nord de la Province orientale, les députés ne jurent que par le passage de leur district au statut de province. « Nous, nous sommes prêts à tenter l’expérience », affirme Wilson Adirodu, élu du territoire d’Irumu. Pas sûr que Kinshasa approuve l’idée. En tout cas, pas avant la tenue des élections provinciales et sénatoriales, à nouveau reportées… sine die.

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