Béchir Gueblaoui

Diplomate tunisien, décédé le 10 novembre à Tunis, à l’âge de 74 ans.

Publié le 25 novembre 2003 Lecture : 3 minutes.

« L’homme de l’Afrique » de la Tunisie est mort d’une crise cardiaque, le 10 novembre, à
Tunis. Béchir Gueblaoui a consacré toute sa carrière diplomatique (1961-1995) aux relations entre la Tunisie et le continent africain, plus particulièrement à l’Afrique subsaharienne. Mais le choix de l’Afrique lui est venu de façon fortuite. Il en fera un sacerdoce assumé avec rigueur tout au long d’une vie discrète et sans histoire.

« Si Béchir », comme l’appellent affectueusement ses collègues et amis, est entré par voie
de concours au ministère de l’Intérieur en 1952. Fonctionnaire à la Sûreté nationale, il est dépêché auprès de la Mission des Nations unies pour le maintien de la paix au Congo. C’est depuis ce mois de juillet 1960 que l’Afrique deviendra pour lui une priorité. Avec une équipe d’experts tunisiens, il ira affronter les événements qui secouent le Congo-Léopoldville et qui le projetteront en dehors de « l’Afrique blanche » jusqu’à sa retraite en 1995.
Dès son retour du Congo, en septembre 1960, il est en effet réaffecté au ministère des Affaires étrangères. L’année suivante, il retournera au Congo-Zaïre non comme commissaire, mais comme diplomate. Chargé d’affaires jusqu’en 1967, il n’aura de cesse qu’il ne conjugue la Tunisie à l’Afrique et vice versa. Son talent et son expérience de terrain seront mis à profit à Tunis où il est appelé à diriger le département Afrique aux Affaires étrangères (1967-1970). Ayant vécu la naissance de l’Organisation de l’unité africaine (1963) à Addis-Abeba, en Éthiopie, il ne tardera pas à y revenir pour s’y
installer effectivement. De là, il supervisera en tant que ministre-conseiller les relations entre la Tunisie et trois autres pays de l’Afrique de l’Est (Kenya, Tanzanie,
Ouganda) ainsi que la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA).

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Après une nouvelle escale à Tunis (1975-1977), il consacrera toute son énergie à ouvrir et à diriger dix années durant la représentation diplomatique à Yaoundé, au Cameroun, avec en plus la couverture du Gabon (1978-1987). Un record de longévité. Ses ambitions étaient quelquefois contrariées par les rapports, mi-euphoriques midistants, que le président Habib Bourguiba entretenait avec ses pairs africains.
Il faudra, en effet, attendre l’arrivée de Zine el-Abidine Ben Ali au pouvoir (1987) pour voir la Tunisie accueillir enfin un sommet de l’OUA (1994). Pour sa présidence en exercice de l’OUA, le président tunisien le rapprochera de son cabinet en tant qu’attaché chargé du suivi des activités de l’organisation panafricaine.
Tunisien, africain, Béchir Gueblaoui est probablement celui qui a le mieux connu l’Afrique des indépendances aux années 1990, en passant par les soubresauts des relations afro-arabes (Dakar, 1976 et Le Caire, 1977). Il a assisté à tous les sommet et à tous
les Conseils des ministres de l’OUA de 1963 à 1994, à l’exception d’une seule année (1992).

Témoin privilégié de cette époque, Si Béchir vivait paisiblement entre Tunis et sa ville
natale, Gabès, où il rejoignait son frère et ses amis. Sa vie aura été sobre, et les visiteurs qui avaient la chance de l’y rencontrer repartaient fiers d’avoir rencontré « un
homme d’Afrique authentique loin des sentiers battus, des préjugés et des intérêts de tous
ordres ». Ses propos n’étaient jamais inutiles, gratuits ou anodins. A-t-il achevé la rédaction de ses Mémoires ? Lequel des quatre enfants qu’il laisse s’y attellerait-il
pour les publier ?
Si Béchir était un homme méticuleux, intransigeant et droit. Je n’oublierai pas pour ma part sa présence constante et discrète les jours où la vie se faisait moins sûre. Il était un homme rare, un homme ouvert et accessible, un homme du Sud, vers lequel il ne cessait de se retourner. Mais l’avait-il jamais quitté ?

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