Côte d’Ivoire : « L’Afterwork » de Radio Nostalgie ou les Guignols de l’info

Imitant les chefs d’État africains, les trublions ivoiriens de la quotidienne L’Afterwork sur Radio Nostalgie passent en revue l’actualité du continent. Rendez-vous le 15 septembre pour la troisième saison.

De g. à dr. : Sonok, Mala Adamo, Chuken Pat, Tonon Jo, Germain Koloko. © Ananias Lékidago pour J.A.

De g. à dr. : Sonok, Mala Adamo, Chuken Pat, Tonon Jo, Germain Koloko. © Ananias Lékidago pour J.A.

Publié le 15 septembre 2014 Lecture : 3 minutes.

Ils pourraient presque se passer des modes traditionnels de publicité. La promotion de leur émission L’Afterwork, de nombreux chauffeurs de taxi ivoiriens s’en chargent quotidiennement. Branchés sur Radio Nostalgie entre 18 heures et 20 heures – du lundi au vendredi -, ils ne boudent généralement pas leur plaisir. Des ambassadeurs de choc pour un programme qui cartonne depuis bientôt deux ans sur les ondes ivoiriennes.

Le concept est simple : "C’est une émission qui vous transporte dans un maquis ou dans un bar", explique Jean-Jacques Varold, le concepteur et ancien présentateur du programme qui vient de quitter la radio pour entamer une carrière télévisée.

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Et qui cède la place pour la troisième saison, qui débutera le 15 septembre, à Éric Didia, qui officiait jusqu’à récemment sur Ivoire FM. "Des potes discutent autour d’un verre de l’actualité et surtout de politique. Chacun dit ce qu’il veut et comme il le veut. Le tout devant être accessible au plus grand nombre", précise Jean-Jacques Varold. À un détail près : ici, la "bande de potes" se prend pour une bande de chefs d’État…

Fin juillet, au siège de la radio, au Plateau, le quartier d’affaires d’Abidjan. Autour de la table ce soir-là, le président Alassane Ouattara, surnommé Alasco Bill pour "son côté américain" (dû aux nombreuses années qu’il a passées aux États-Unis, lors de ses études puis au FMI) et interprété magistralement, jusque dans le rythme de la respiration, par le célèbre humoriste Chuken Pat. Alasco Bill, omnipotent, est partout à la fois.

Une bonhomie en commun avec Henri Konan Bédié

Tout aussi bluffant, Germain Koloko est lui aussi humoriste. Avant de prendre la voix de l’ex-président Henri Konan Bédié, il en prend d’abord la posture – aidé par une certaine bonhomie qu’ils ont en commun – puis fige son visage. "Nous sommes en train d’en discuter au sein du PDCI-RDA…", répond-il à chacune des questions posées par le présentateur. Aujourd’hui, Bédié (le faux) ne veut parler que du parti de Bédié (le vrai), que ce dernier, 80 ans aujourd’hui, dirige d’une main de maître. Et ce depuis vingt ans. Affable mais têtu, il refuse d’aborder tout autre sujet.

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Pendant deux heures, les chroniqueurs passent d’un sujet à l’autre. Et si le déroulé de l’émission peut sembler très naturel, voire improvisé, tout est en fait minutieusement préparé. L’équipe se réunit quotidiennement pour choisir les sujets du jour, après lecture attentive de la presse, et prévoit chacune des interventions.

Laurent Gbagbo épargné :  "il ne peut pas se défendre face à sa caricature"

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Au tour de Mala Adamo, dont les spécialités sont le Burkinabè Blaise Compaoré et le Nigérien Mahamadou Issoufou, qu’il transforme en imam, répétant appels à la prière et louanges à Dieu. Sonok, lui, préfère le Premier ministre ivoirien, Daniel Kablan Duncan. Ton professoral, même lorsqu’il s’agit de parler des sujets les plus loufoques, comme du parcours d’un tilapia entre le Brésil et la Côte d’Ivoire. Chuken Pat prend l’accent wolof. Macky Sall s’interroge sur son impopularité. Il imite ensuite Moussa Dadis Camara, qui raconte "avoir rencontré la chevrotine" – en référence à la tentative d’assassinat dont le Guinéen a fait l’objet en 2009 – et s’être converti au christianisme juste après.

La bande de L’Afterwork ne s’interdit aucune imitation, mise à part celle de l’ex-président Laurent Gbagbo, aujourd’hui à la CPI, car "c’est le seul qui ne peut se défendre" face à sa caricature. Elle affirme aussi ne jamais avoir eu le moindre problème avec les autorités. Mieux, près d’une dizaine de ministres – ainsi que des membres de l’opposition – sont déjà venus assister à l’enregistrement de l’émission.

Quant au chef de l’État, Alassane Ouattara, dont l’épouse, la première dame, a acquis une participation conséquente dans Radio Nostalgie dans les années 1990, il a même eu droit, le jour de son anniversaire, à une représentation privée. "L’Afterwork, c’est une thérapie collective pour les Ivoiriens, ajoute Jean-Jacques Varold. Quand on sait d’où l’on vient et ce que nous a fait subir la politique, on se dit que c’est incroyable de pouvoir en rire aujourd’hui et de s’en moquer."

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