Photographie : Samuel Fosso, un dandy à Cotonou

La Fondation Zinsou présente, jusqu’à fin juillet, des autoportraits du photographe Samuel Fosso. À découvrir également, les clichés en noir et blanc – moins connus – de ses débuts.

Le Bus culturel permet aux scolaires de venir visiter la fondation. © Fondation Zinsou

Le Bus culturel permet aux scolaires de venir visiter la fondation. © Fondation Zinsou

Publié le 23 avril 2014 Lecture : 3 minutes.

"La première fois que j’ai rencontré Samuel Fosso, je me suis dit que cet homme qui conversait peu, en mélangeant le français et l’anglais, tout en parlant de lui à la troisième personne, était soit vraiment cinglé soit un pur génie." Pour évoquer le parcours du célèbre photographe camerounais, à qui elle consacre sa nouvelle exposition, la Fondation Zinsou (Cotonou) a eu la bonne idée de faire intervenir une personne qui le connaît bien – pour avoir collaboré plusieurs fois avec lui -, l’inclassable curateur Simon Njami. L’occasion pour celui-ci de partager, au cours d’une conférence intitulée "Dorian Gray à Bangui" et organisée le 15 avril au siège de la Fondation, petites anecdotes savoureuses et éclairages sur l’oeuvre du photographe internationalement reconnu, mais aussi de donner de ses nouvelles.

Souvenez-vous : en janvier, Samuel Fosso, qui vit en Centrafrique depuis l’âge de 10 ans, quitte précipitamment le pays plongé dans le chaos et la guerre civile. Après son départ pour Paris, sa maison de Bangui est pillée. Ses archives, brûlées. Des journalistes étrangers, présents sur place, réussissent tout de même à en sauver une partie. "Il est aujourd’hui au Nigeria [où vit sa famille] et il va bien, même s’il est encore très choqué par les événements", précise Simon Njami. Raison pour laquelle, entre autres, Samuel Fosso n’a pu assister au vernissage de l’exposition, deux jours plus tôt. Ce soir-là, le 12 avril, la Fondation Zinsou avait ouvert son espace à quelques dizaines d’invités triés sur le volet.

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"L’idée était de rassembler des oeuvres représentant l’évolution du travail de l’artiste dans le temps, pour un public, notamment scolaire, qui découvre son travail, explique Marie-Cécile Zinsou, présidente de la fondation et commissaire de l’exposition. En Europe, par exemple, les gens ont toujours une vague idée de ce que peut faire un artiste ; ici, pas du tout, compte tenu notamment du désert culturel créé par le gouvernement béninois. Il faut donc être le plus complet possible."

"Il faut toujours un peu de légende pour transporter les histoires"

Au rez-de-chaussée, l’on découvre donc des clichés en noir et blanc illustrant les débuts dans les années 1970 d’un Fosso autodidacte influencé par ses aînés, les Maliens Seydou Keïta et Malick Sidibé. Des couples, des groupes, prennent la pose. Mais déjà l’envie de passer lui-même devant l’objectif se fait sentir. Et si la légende dit qu’il commença à réaliser ses premiers autoportraits pour les envoyer, en guise de nouvelles, à sa grand-mère maternelle restée au pays, Simon Njami tient à apporter un petit bémol : "Il faut toujours un peu de légende pour transporter les histoires."

Pour lui, Fosso a surtout eu une "divine inspiration", qui l’a très rapidement conduit à enfiler le soir venu des tenues souvent extravagantes et à se photographier seul. "Avec le temps, ces autoportraits sont plus sophistiqués, la mise en scène s’améliore. Il a plus de prestance, il pose." Comme dans la deuxième partie de l’exposition, au premier étage. Là, se dévoile l’une des plus célèbres séries de l’artiste, celle intitulée Tati et réalisée en 1997 pour la chaîne française de vêtements du même nom. Fosso en golfeur, en maître-nageur, en bourgeoise africaine, en pirate, en "femme américaine libérée", en "chef" africain. Le Camerounais se métamorphose, tout en distillant des critiques sur les sociétés occidentales et africaines. En fin de parcours, les visiteurs peuvent ensuite tenter de se mettre dans la peau du photographe. Un studio a été installé, avec costumes et décors fétiches de l’artiste à disposition.

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Samuel Fosso, jusqu’à fin juillet, à la Fondation Zinsou, à Cotonou (entrée libre)

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